Au Sud-Kivu, la Monusco veut mettre fin aux conflits récurrents et violents créés par la transhumance.

Au Sud-Kivu, la Monusco veut mettre fin aux conflits récurrents et violents créés par la transhumance.
19 jan 2017

Au Sud-Kivu, la Monusco veut mettre fin aux conflits récurrents et violents créés par la transhumance.

Une réunion de présentation d’un ambitieux projet inter-provincial a eu lieu ce mercredi 18 janvier 2017 au Quartier général de la Force de la Mission onusienne à Uvira. L’implication des autorités aussi bien nationales, provinciales et locales est recommandée, tout comme le dialogue intercommunautaire.

Uvira, le 18 janvier 2017 – Au Sud-Kivu et particulièrement dans les Territoires de Fizi et d’Uvira, il n’y a pas que les groupes armés Maï Maï qui provoquent et créent de l’insécurité. Un autre phénomène beaucoup moins médiatique mais tout aussi préoccupant et récurrent est celui de la transhumance : ces mouvements de vaches qui se déplacent d’une localité à une autre, au gré des saisons et à la recherche de pâturages. Certains de leurs passages se soldent par des destructions de champs, provoquant ainsi l’ire des agriculteurs qui, pour se venger face à ce qu’ils considèrent comme impunité, font appel à des groupes armés. Obligées d’intervenir pour faire ramener le calme, la Police et les FARDC sont parfois débordées, les affrontements entre ces forces de l’ordre et les groupes armés ont souvent occasionné mort d’hommes, comme ce fut le cas récemment en juin 2016 dans la localité d’Iseke en Territoire de Fizi. On en parle depuis des années, des tentatives de solution ont été esquissées, sans grand succès. L’équation se complique davantage quand on sait que parmi les propriétaires de cheptels se retrouvent d’éminentes personnalités issues de tous les milieux : officiers supérieurs des FARDC et de la Police Nationale Congolaise ; Gouvernements provinciaux et central de la République, etc. Il y a même une transhumance dite internationale issue de la Tanzanie, du Rwanda et du Burundi, pays voisins de la RDC qui déversent d’énormes quantités de bœufs destinés à la commercialisation et qui transitent par certains points d’entrée tels que Kiliba, Sange, Runingu, Katogota (en Territoire d’Uvira), Kilembwe ou Lubonja (en Territoire de Fizi).

Dans le cadre de la protection des civils, la Monusco a développé depuis novembre dernier une stratégie en six étapes destinée sinon à mettre fin, du moins à atténuer les effets négatifs de ce phénomène de transhumance. Le but de cette initiative de la Mission onusienne qui se veut inter-provinciale (puisqu’englobant les Provinces du Maniema et du Tanganyika) est d’obtenir une plus grande implication des autorités congolaises à tous les niveaux : central, provincial et local. Pour le Chef du Sous-bureau de la Monusco-Uvira, Ould Mohamed El Hacen, initiateur du Projet, il s’agit, à terme, « d’amener ces autorités à s’approprier les mécanismes de résolution durable de ce conflit qui d’année en année, fait des victimes ». Le Projet, qui en est à sa troisième étape, entend donc identifier les causes profondes de cette violence récurrente due à la transhumance ; ensuite et dans une phase ultérieure, il s’attellera à impliquer les populations locales souvent victimes de ce phénomène dans un dialogue intercommunautaire inclusif permettant à toutes les parties prenantes d’identifier les causes profondes des conflits, d’en proposer les pistes de solution ; mais aussi et surtout de s’engager durablement à s’approprier la dynamique afin de réduire au maximum les incidents de sécurité liés à la transhumance ; cela, tout en appuyant l’Etat à travers ses services techniques spécialisés, dans ses prérogatives régaliennes d’organisation d’exploitations agricoles dont entre autres l’élevage traditionnel.

Le projet entend aussi renforcer les mécanismes de protection et de gestion des conflits déjà existants mis en place aussi bien par les  autorités locales  que par les partenaires dont la Monusco et qui nécessitent d’être revitalisés et appropriés par les communautés pour une résilience locale effective. Il en est de même des initiatives multiples sur le dossier : le cas notamment du fameux Accord sur la transhumance signé en septembre 2010 à Baraka par les Chefs coutumiers, les éleveurs et agriculteurs qui devra être actualisé et révisé au vu du contexte actuel et de l’arsenal juridique en la matière.

Beaucoup d’activités communautaires sont également prévues dans le cadre de ce projet qui doit être finalisé un mois avant le début de la prochaine transhumance (mai/juin à septembre) ; parmi celles-ci : des missions conjointes d’itinérance vers les zones affectées pour une large sensibilisation à une transhumance apaisée, mais aussi des renforcements de capacités des acteurs (surtout les jeunes et les femmes) sur les outils de protection et la gestion des conflits. Il faut noter que ce projet est entièrement financé par la Monusco à hauteur de 39.900 dollars américains pour une période de six mois (novembre 2016-avril 2017) ; il vient en appui aux Gouvernements provinciaux du Maniema, du Tanganyika et du Sud-Kivu dans le cadre de la contribution de la Mission à l`exécution des leurs plans provinciaux respectifs de Stabilisation. 

Jean-Tobie Okala

Photos: Affaires civiles/Monusco Uvira