A Djaiba, les déplacés et la population ne jurent que par la MONUSCO

Les assistants de liaison communautaire (CLA) de la section des Affaires civiles renforcent les capacités des partenaires locaux pour leur participation et implication directe dans la protection de leurs communautés. /Photos MONUSCO

20 sep 2022

A Djaiba, les déplacés et la population ne jurent que par la MONUSCO

Jean-Tobie Okala

« C'est grâce à ces casques bleus de la MONUSCO que nous nous sommes installés ici. Ils nous protègent. Le jour où ils partiront d'ici, nous serons également obligés de déménager pour éviter de nous faire tuer par les Codeco », affirmait le 14 septembre 2022 une femme déplacée du camp de Djaiba, dans le secteur des Walendu Djatsi, territoire de Djugu, à environ 65 km de Bunia, en Ituri. Ce camp, situé à quelques mètres de la base de la MONUSCO, est aussi vaste que cinq terrains de football et héberge plus de six mille personnes. 

Une fois par mois se tient une réunion dite "Urafiki meeting", laquelle réunit les partenaires de la protection dont les casques bleus de la MONUSCO, l’armée congolaise (FARDC), la police nationale congolaise (PNC), l’agence nationale de renseignements (ANR), les chefs de groupements, les membres du comité local de protection (CLP), ainsi que des femmes leaders de Djaiba et Fataki.

Le 14 septembre dernier, ils étaient 17 participants réunis à la base militaire de la MONUSCO à Djaiba pour discuter de la situation sécuritaire, des mesures pour prévenir les menaces des miliciens de la Codeco ainsi que de la situation humanitaire dans la zone. Ce jour-là, 120 cas d'enfants atteints de Kwashiorkor ont été signalés au camp de déplacés de Lodha, situé à 3 km de Djaiba.

Patrouiller, pour dissuader les assaillants...

A Djaiba, les casques bleus népalais, qui ont succédé en 2021 à leurs collègues uruguayens, assurent vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept la protection des civils et luttent contre les groupes armés actifs dans cette zone depuis plusieurs années.

Ils organisent des patrouilles de combat et de sécurisation, de jour comme de nuit, au cours desquelles ils échangent avec les populations civiles pour collecter des informations sécuritaires, mais aussi pour avoir leurs recommandations pour renforcer leur protection.

Les informations à caractère humanitaire sont partagées avec les humanitaires (Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations Unies OCHA, notamment). Chaque soir, entre 19h et 21h, parfois 22h, une nouvelle patrouille de casques bleus est organisée.

Au cours de ces patrouilles, il arrive parfois que les casques bleus portent secours à des passagers de véhicules en détresse sur une route, qu'ils interviennent en cas d'incendie, qu'ils accompagnent des agriculteurs dans leurs champs où ils les protègent contre les attaques des groupes armés... Toujours lors de ces patrouilles de dissuasion, les casques bleus n'hésitent pas à ouvrir le feu sur des assaillants rencontrés sur leur chemin et qui s'apprêtaient à lancer une attaque contre des civils, ce qui permet de mettre en déroute ces rebelles et d'épargner ainsi de nombreuses vies humaines.

La protection des civils, c'est l'affaire de tous.... 

Afin de mieux protéger les civils, les soldats de la paix encouragent les populations locales à alerter de manière active la MONUSCO afin de réduire les menaces et violences perpétrées par des miliciens. Par exemple, la société civile est invitée à dénoncer la présence des rebelles ou leurs mouvements à la MONUSCO et aux services de sécurité (FARDC et police).

Pour ce faire, les casques bleus sensibilisent les populations locales aux outils de protection des civils et d’alertes précoces. En réalité, ce sont les assistants de liaison communautaire (CLA) de la section des Affaires civiles de la Mission qui renforcent les capacités des partenaires locaux pour leur participation et implication directe dans la protection de leurs communautés. 

En moyenne, les assistants de liaison communautaire de la MONUSCO affirment recevoir ainsi dix appels quotidiens, sans compter les appels passés par eux-mêmes pour s'enquérir de la situation sécuritaire dans la zone. Ainsi, en cas d'alerte, ce chiffre monte à 30 ou 40 appels quotidiens émanant des différents acteurs de protection. Une fois ces alertes reçues, les casques bleus à leur tour saisissent les services de sécurité congolais pour une intervention proactive qui peut être conjointe (MONUSCO/FARDC) ou séparée.

« Un cas concret par exemple est celui intervenu le 9 mai dernier quand des miliciens de la Codeco venaient d'attaquer le site des déplacés de Lodha, il était alors 21h locales. Une fois l'alerte reçue du président des déplacés de Lodha, les casques bleus avaient immédiatement envoyé une patrouille robuste pour arrêter cette attaque, ce qui avait permis de limiter les dégâts humains », explique un des assistants de liaison communautaire de la MONUSCO.  

Et de poursuivre : « Puis, avec l'arrivée quelques minutes plus tard des FARDC, les deux forces avaient repoussé ces rebelles qui avaient fini par battre en retraite... Les combats avaient duré toute la nuit, jusqu'à 6-7 heures du matin. Nous avions passé deux jours sans dormir, parce-que l'alerte était maximale ", déclare-t-il, fier d'avoir fait partie de cette équipe qui a sauvé de nombreuses vies humaines.

"Que ceux qui ne savent pas ce que fait la MONUSCO viennent ici pour voir..." 

Sabina Ngbasilikale est une femme leader de Fataki, responsable de l’association AVEK MAENDELEO. Elle témoigne que la MONUSCO reste activement engagée aux côtés des FARDC pour assurer la protection des civils. « Dire que la MONUSCO donne des armes aux miliciens, c’est de la part des gens qui ne savent rien, ils ne comprennent et ne savent rien du travail de la MONUSCO. Ce sont des gens qui ne veulent pas le développement et parlent comme s’ils étaient dans le désert. Nous qui sommes ici à Djaiba, Fataki, nous sommes sereins avec la MONUSCO. Nous sommes bien sécurisés. Le jour où la MONUSCO va partir d’ici, nous, les déplacés de Djaiba, nous allons aussi partir avec la MONUSCO, parce-que nous sommes venus ici pour bénéficier de la protection de la MONUSCO », explique-t-elle.

Jean-Vianney Mateso Dz’bo, chef de groupement de Djaiba, ne dit pas autre chose. Selon lui, les patrouilles de la MONUSCO sont une barrière à l’activisme des groupes armés à Djugu, notamment la Codeco. « La MONUSCO a distribué des numéros verts pour encourager la population à alerter au moment où il y a des problèmes, la nuit comme la journée. La MONUSCO est disponible et intervient chaque fois qu’il y a une alerte de la population. Les militaires de la force onusienne sont en train de soutenir notre force loyaliste les FARDC. Elle se déploie pour veiller sur le site des déplacés de Lodha qui se trouve hors de notre entité », raconte-t-il.

Et de conclure : « Nous sommes témoin de cette collaboration qui règne entre la communauté et la MONUSCO. Chaque fois qu’il y a des problèmes, la MONUSCO multiplie les réunions pour échanger autour des difficultés dans la communauté, et voir comment trouver des solutions. Et nous y participons tous : leaders communautaires, chefs, locaux, femmes leaders, jeunes gens... En tous cas, nous sommes satisfaits de ce que fait la MONUSCO à qui nous disons merci ».