Les femmes du Nord-Kivu et de l’Ituri veulent s’impliquer davantage dans la construction de la paix [1]
Les femmes du Nord-Kivu et de l’Ituri veulent s’impliquer davantage dans la construction de la paix
En marge de la célébration du 25ᵉ anniversaire de la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies, une série de conférences s’est tenue du 21 au 23 octobre 2025 à Goma, Beni et Bunia, réunissant plusieurs associations féminines, des partenaires nationaux et internationaux ainsi que des agences du système des Nations Unies.
Organisée par la section Genre de la MONUSCO, cette rencontre cherchait à promouvoir une participation plus active des femmes aux initiatives de paix dans une région meurtrie par des décennies de conflit armé. Le thème retenu pour cette commémoration était évocateur : « Quand les femmes dirigent, la paix s’installe ».
Mardi 21 octobre à Goma, plus de 90 déléguées d’organisations féminines du Nord-Kivu et de l’Ituri, certaines en visio-conférence depuis Beni et Bunia, ont pris part aux travaux. Ces défenseuses des droits des femmes ont appelé à un rôle plus actif dans les processus de paix dans l’est de la République démocratique du Congo. Dans son allocution d’ouverture, Vivian van de Perre, Représentante spéciale adjointe du Secrétaire général des Nations Unies en RDC, a souligné l’importance de l’Agenda Femmes, Paix et Sécurité dans un contexte marqué par la persistance des violences.

« Depuis ma prise de fonction, j’ai pu constater sur le terrain, en Ituri et au Nord-Kivu, combien les femmes restent au cœur des enjeux de paix et de protection des civils », a-t-elle déclaré, avant d’ajouter : « La MONUSCO œuvre à la mise en œuvre de cet agenda à trois niveaux, notamment politique, sous le leadership de Madame Bintou Keita. La Mission plaide pour une meilleure représentation des femmes dans les instances de décision ».
Faire des femmes des actrices à part entière de la paix
Adoptée en octobre 2000, la résolution 1325 du Conseil de sécurité met l’accent sur l’impact disproportionné des conflits armés sur les femmes et les filles, ainsi que sur la nécessité de leur participation aux processus de paix.
Despine Kavugho, coordinatrice du Collectif des Femmes de Paix pour la Participation et la Représentation dans les Instances Décisionnelles (CEFRID), a regretté que les femmes demeurent souvent marginalisées dans les processus de paix, alors qu’elles en sont des piliers essentiels. « Il y a 25 ans, la résolution 1325 a été adoptée et notre ministère du Genre a élaboré le plan national », a-t-elle rappelé. « C’est au niveau de la vulgarisation et de l’appropriation qu’il faut se concentrer. Hélas, on ne le sent pas encore et c’est pourquoi nous restons souvent absentes des espaces de décision et de recherche de la paix durable. Cela ne sera possible qu’avec la participation de tous, y compris des hommes, à travers la promotion de la masculinité positive. », a-t-elle estimé tout en soulignant que le principal défi réside encore au niveau des décideurs.
Vivian van de Perre a réaffirmé l’engagement stratégique de la Mission à défendre la voix des femmes congolaises dans les forums nationaux et internationaux, citant l’adoption du troisième Plan d’action national 1325, appuyé par ONU Femmes, comme « une étape clé dans le contexte congolais ». Sur le plan opérationnel, elle a mis en avant l’intégration de la dimension genre dans les activités des sections de la MONUSCO et de l’UNPOL, notamment à travers la protection des civils, la participation des femmes aux dialogues communautaires, la formation de femmes leaders et de médiatrices, l’appui aux victimes de violences sexuelles et la promotion de la masculinité positive.
Évaluer les avancées et les défis
Durant la conférence, ONU Femmes a présenté les réalisations et l’impact du Plan d’action national 1325 dans le domaine de la protection. La Division congolaise du Genre, de la Famille et de l’Enfant a exposé la mise en place des secrétariats provinciaux de la « 1325 », tandis que l’unité de Protection des civils de la MONUSCO a rappelé l’importance d’intégrer l’agenda Femmes, Paix et Sécurité dans toutes les actions de protection.
La section des Affaires civiles a mis en lumière la contribution des femmes dans les mécanismes d’alerte communautaire, et le Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’Homme (BCNUDH) a présenté son travail de suivi et d’accompagnement des victimes de violences sexuelles.

De son côté, la division des Affaires politiques a souligné la participation des femmes dans les processus de paix dans l’est de la RDC, tout en mettant en avant les défis persistants et les perspectives d’avenir.
Enfin, l’unité Programme Management (PMU) de la MONUSCO a montré comment la prise en compte du genre dans les projets à impact rapide favorise une meilleure inclusion et renforce la cohésion communautaire.
Autant d’initiatives et d’avancées qui nourrissent l’optimisme de Zaina Mignone, de la Fondation Bi-Esther. « Il y a déjà des femmes qui participent aux processus de paix et aux médiations grâce à cette résolution. Cependant, il faut renforcer la sensibilisation pour que la femme s’approprie davantage cette résolution, car c’est elle qui doit la concrétiser sur le terrain », a-t-elle expliqué. Selon elle, « la femme congolaise a tout le pouvoir d’atteindre les objectifs de la 1325 si elle s’implique activement ».
Soutenir le leadership féminin pour une paix durable
À l’occasion de ce 25ᵉ anniversaire de la résolution 1325, les déléguées des associations féminines ont souligné que l’heure est à l’action, malgré les nombreux défis structurels, institutionnels, sécuritaires et socio-culturels. « Lorsqu’on veut, on peut », a martelé Zaina Mignone. « Il suffit de prendre la décision et d’unir nos énergies pour atteindre cet objectif. Si nous nous approprions pleinement le Plan d’action 1325, nous pourrons mener d’autres plaidoyers et prouver que les femmes participent activement à la paix ».
De son côté, Nathalie Koné Traoré, chargée de la section Genre de la MONUSCO à Goma, a reconnu des avancées notables tout en plaidant pour une meilleure prise en compte des femmes déplacées, souvent confrontées à des conditions précaires, et pour le renforcement de la participation féminine dans le débat public malgré des barrières culturelles encore fortes.

