La réponse de la MONUSCO face aux exploitations et abus sexuels commis par son personnel

Des militaires des contingents sud-Africains et malawites suivant une formation sur le droit et la promotion des femmes et le respect des droits humains. Photo MONUSCO/Force

14 déc 2023

La réponse de la MONUSCO face aux exploitations et abus sexuels commis par son personnel

Erin Sarah Kennedy

C'est jeudi soir à Beni. Alors que de nombreux habitants terminent leur journée dans la ville du Nord-Kivu en République démocratique du Congo (RDC), pour une équipe en visite, sa journée de travail est sur le point de commencer.

Le son de rumba exécuté par un groupe musical populaire retentit dans un bar populaire. L’équipe de déontologie et discipline de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la Stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) entre dans la boîte de nuit.

« Récemment, notre équipe a visité cinq bars et lieux de loisirs à Beni », a déclaré Maria Rocheteau, cheffe par intérim de l'équipe de déontologie et discipline de la MONUSCO. « Ces affaires de divertissement, connues pour leur commerce florissant de relations sexuelles transactionnelles, sont interdites à tout le personnel de la MONUSCO et l'équipe a procédé à des contrôles de routine pour voir si elle rencontrerait éventuellement le personnel militaire ou civil de la Mission ».

Ces équipes multidisciplinaires d'évaluation des risques ont été dépêchées en novembre dans les trois provinces où les soldats de la paix des Nations Unies (ONU) sont déployés pour identifier et comprendre les risques d'exploitation et d'abus sexuels par le personnel de l'ONU. Cela fait suite à la suspension et à la détention en octobre de huit membres de la Force militaire de la MONUSCO pour leur « violation systématique et généralisée » des consignes de l’organisation. Ces soldats ont été surpris en train de fraterniser dans des endroits connus pour promouvoir le sexe transactionnel, ce qui est interdit par la politique de tolérance zéro du Secrétaire général de l'ONU, concernant l'exploitation et les abus sexuels.

Depuis octobre, les équipes de déontologie et discipline ont évalué les facteurs de risque dans plus de vingt-huit zones rurales et urbaines, en visitant les lieux où des comportements répréhensibles sont susceptibles de se produire, tels que les maisons closes, les bars, les marchés, souvent installés à proximité des bases de la MONUSCO. Grâce aux conclusions de leur travail, la MONUSCO sera en mesure de renforcer les mesures de prévention et de réponse.

Par ailleurs, afin de dissuader le personnel de l'ONU de se rendre dans les zones interdites, la police militaire de l'ONU et les unités de police issues de l'UNPOL effectuent des patrouilles conjointes et renforcent les points de contrôle pour surveiller les employés, prévenir les abus d'alcool et d'autres substances, ainsi que pour détecter la présence de passagers non autorisés à bord des véhicules de l'ONU.

La MONUSCO condamne fermement toute exploitation et tout abus sexuels car ils ont un impact dévastateur sur les victimes. Les droits et la dignité des victimes sont au cœur des efforts de l’ONU pour prévenir et répondre aux abus sexuels et la MONUSCO a intensifié les mesures préventives, coercitives et correctives.

« Je suis aux côtés des victimes d'exploitations et d'abus sexuels et leurs besoins constituent la priorité absolue de l'ONU », a déclaré Bintou Keita, Représentante spéciale du Secrétaire général en RDC. « Je m’engage à persévérer dans nos efforts pour remédier à ces torts". L'ONU a mis en place des mécanismes pour orienter les victimes identifiées vers des services médicaux, psycho-sociaux et de protection. Le bureau du responsable principal des droits des victimes facilite la fourniture d’une assistance aux victimes et veille à ce que leurs droits et leur dignité soient toujours respectés.

La Mission travaille en étroite collaboration avec les communautés pour leur donner les moyens d'identifier et de prévenir l'exploitation et les abus sexuels, d'aider les victimes et les témoins à signaler les incidents et à demander de l'aide. Elle a également mis en place des réseaux communautaires de plaintes dans 43 localités à travers le pays.

Au fil des années, 866 femmes et hommes ont été formés pour collaborer avec la Mission, afin de sensibiliser les communautés, les écoles ou les marchés aux normes de conduite attendues du personnel de l'ONU et à la manière de signaler les allégations. Ces efforts sont essentiels pour prévenir et mettre fin aux inconduites sexuelles, ainsi que pour garantir le respect de la dignité des victimes.

Les réseaux communautaires constituent un lien essentiel entre la Mission, les victimes et les communautés vulnérables. Leur profonde compréhension du contexte local et la confiance qu’ils ont gagnée contribuent à renforcer la confiance dans l’ONU, en améliorant les rapports et l’assistance aux victimes dans le besoin.

Le Code de conduite des Nations Unies interdit les relations sexuelles entre le personnel de la Mission et les bénéficiaires de l'assistance des Nations Unies. En outre, la politique de non-fraternisation de la Mission limite l’interaction entre les soldats de la paix en uniforme et la population locale, au-delà de ce qui est nécessaire pour accomplir leurs fonctions officielles.

Pour garantir que le personnel respecte les politiques pertinentes, les responsables de la MONUSCO, les commandants de secteur, les chefs de bureaux militaires et les commandants d'équipe sont tenus de rappeler régulièrement à leur personnel respectif leurs obligations en vertu du serment de l'ONU qu'ils ont signé lors de leur adhésion à l'organisation et d'autres réglementations, règles, directives, notamment le Code de conduite personnelle des Casques bleus. Des appels surprises sont également effectués par les commandants des contingents militaires pour garantir le respect des politiques limitant les activités en dehors des bases.

En outre, les points focaux nommés au sein du quartier général de la Force de la MONUSCO fournissent soutien et conseils, se réunissant mensuellement avec les commandants de bataillon et de contingent pour partager les bonnes pratiques en matière de prévention. La Mission améliore et intensifie également la fréquence des formations visant à sensibiliser aux conséquences des abus et de l'exploitation sexuels, grâce à des formations d'initiation pour le nouveau personnel et à des séances de recyclage pour ceux déjà en mission. Le personnel civil et en uniforme doit participer à ces formations afin de mieux comprendre les conduites interdites et le devoir de chacun de signaler les fautes présumées, suspectées ou réelles.

« Forte des leçons apprises, la MONUSCO s'engage à mettre fin à toutes les formes d'exploitation sexuelle et d'exploitation par le personnel de l'ONU, et s'efforce de rétablir la confiance avec les communautés, d'améliorer les mesures de prévention et de réponse, ainsi que d'assurer un plus grand sens des responsabilités parmi ses membres du personnel », a déclaré Mme Keita. "La MONUSCO s'engage à s'acquitter de son mandat dans le respect des valeurs de l'ONU : humanité, humilité, inclusion et intégrité, et à servir le peuple congolais avec fierté et honneur".