Kasaï : grâce à la MONUSCO, des ex-miliciens réhabilitent le bâtiment de la commune de la Nganza

Kasaï : grâce à la MONUSCO, des ex-miliciens réhabilitent le bâtiment de la commune de la Nganza. Photo MONUSCO/Laurent Sam OUSSOU

31 mai 2019

Kasaï : grâce à la MONUSCO, des ex-miliciens réhabilitent le bâtiment de la commune de la Nganza

Joel Bofengo

C’était l’un des lieux de Kananga qui rappelaient le plus les violences auxquelles la région du Kasaï a fait face en 2016 et 2017. Le bâtiment administratif de la commune de la Nganza portant des traces de saccage et d’incendie. L’édifice a été complètement détruit lors des violents affrontements de mars-avril 2017 entre la milice Kamuina Nsapu et les forces de l’ordre. Nganza était considéré comme un bastion de la milice.

Deux ans après, trois mois de travaux vont finalement effacer les marques de violences que portait ce bâtiment où les agents de l’Etat vont à nouveau travailler.

Comme pour marquer la fin d’une période difficile que tout le monde voudrait ne plus revivre. Ce sont des ex-miliciens qui ont été employés pour réhabiliter un bâtiment qu’ils avaient eux-mêmes détruits.

« Apprends-moi à pêcher »

Cette réhabilitation a été réalisée grâce à un projet de l’ONG locale BEMPRODEC financée par la section DDR de la MONUSCO dans le cadre de son programme de réduction des violences communautaires. Environ 100 000 dollars américains ont été mobilisés par la mission onusienne pour l’exécution de ce projet qui a commencé en janvier avec la formation d’ex-miliciens. Car l’idée n’était pas seulement de rebâtir un bâtiment détruit. Il était surtout question de réinsertion d’ex-miliciens. Ils étaient trente au total : jeunes filles et jeunes garçons. Ils ont été formés en maçonnerie et en menuiserie.

« Au début, on avait un peu de doute. On se disait est-ce que ces jeunes, sortis de la milice avec le peu de temps qu’ils ont été formés, seraient capables de faire quelque chose. Mais aujourd’hui c’est une nette satisfaction », fait savoir le coordonnateur du projet, Kadima Mpoyi.

Après donc un mois de formation et trois mois de travaux, ils ont réussi leur pari. Les ex-miliciens ont réhabilité le bâtiment.

Une fierté, commente l’un d’eux. Fidèle Ngandu a combattu dans les rangs de la milice Kamuina Nsapu pendant les violences.

« C’est notre maison, on ne pouvait pas la laisser en désordre. Comme la MONUSCO est arrivée pour nous appuyer, nous nous sommes dit que nous devons la réhabiliter », explique-t-il.

Fidèle Ngandu saisit bien l’importance de ce projet qui va bien au-delà d’une simple réhabilitation de bâtiment. Pour lui, c’est surtout une question d’autonomie personnelle. Car maintenant, il a appris un métier qu’il va exercer pour vivre.

Pour expliquer l’importance de ce projet, il va puiser une métaphore :

« Il y a un adage en français qui dit : ‘’Si tu me donnes un poisson, je mangerai un jour. Si tu m’apprends à pêcher, je n’aurai plus faim’’. La MONUSCO nous a appris un travail. Je vais commencer à faire mon travail désormais. »

« Un soulagement »

Le bourgmestre de la commune de la Nganza ne cache pas non plus sa joie. Celle d’avoir à nouveau un lieu de travail dans de bonnes conditions.

Pendant deux ans, avec ses collaborateurs, elle travaillait dans un bureau de fortune aménagé dans la salle polyvalente de la commune. Pas de conditions idéales de travail.

« Nous allons reprendre nos activités réellement dans nos anciens bâtiments qui étaient incendiés par les miliciens Kamuina Nsapu. C’est un ouf de soulagement surtout pour les agents de l’Etat. Ils travaillaient dans de mauvaises conditions. Maintenant qu’ils vont travailler dans de bonnes conditions, on n’aura plus de plainte », déclare Mamie Kakubi.

 Le bourgmestre en profite pour reparler de la question des ex-miliciens. Elle dit en recevoir quotidiennement qui demandent à être insérés dans des projets pour apprendre des métiers et pouvoir travailler.

Comme dans d’autres territoires de la région du Kasaï, la question de l’encadrement des ex-miliciens continue de se poser.

Ce sont des projets comme celui de la Nganza qui permettront de relancer dans la vie des jeunes pris dans le tourbillon de la violence qui a déchiré cette région du Centre du pays en 2016 et 2017.