Sud-Kivu : Forum sur le phénomène d’enlèvement et viol des mineurs à Kavumu

16 sep 2015

Sud-Kivu : Forum sur le phénomène d’enlèvement et viol des mineurs à Kavumu

Bukavu, le 14 septembre 2015 — Le Bureau Conjoint des Nations Unies aux Droits de l’Homme a organisé le lundi 14 septembre 2015 un forum sur le phénomène d’enlèvement et viol des mineurs à Kavumu, territoire de Kabare. Des défenseurs des droits de l’Homme, des agents de l’ordre, des magistrats y ont pris part.

Comprendre le phénomène d’enlèvements et de viols des mineurs à Kavumu dans tous ses contours et, autant que cela se peut, y trouver des remèdes, voilà ce qui a motivé le forum organisé par le BCNUDH à Kavumu même, selon Abdoul Aziz Thioye, Directeur Adjoint du Bureau Conjoint des Nations Unies aux Droits de l’Homme (BCNUDH) en RDC.

Kavumu est une cité du territoire de Kabare où, de 2012 à 2015, l’on a enregistré au moins quarante cas de viols sur mineurs. Selon le BCNUDH, « plusieurs rapports aussi bien des ONG que des autorités judiciaires font état d'une vingtaine de cas de viols d’enfants de moins de 12 ans et une trentaine d'autres cas de viols d’ enfants compris entre 12 et 17 ans qui ont été commis selon le même mode opératoire. » L’année la plus sombre a été 2014, avec pas moins de trente cas.


« Ce qui se passe à Kavumu nous interpelle tous »
, a reconnu Abdoul Aziz Thioye. Le Directeur Adjoint du BCNUDH a aussi fait savoir que les informations sur les viols et abus sur les mineurs à Kavumu « inquiètent beaucoup les Nations Unies » ainsi que les autorités du pays, qui ont « la responsabilité première de protéger les personnes, en particulier les enfants… »

Maître Ephraïm Iragi, modérateur du Consortium SOS Jeunes Filles en Danger et président honoraire de la Société Civile/noyau de Kavumu, est parmi ceux qui ont tenté de faire un état des lieux du phénomène sous examen. Selon lui, les enlèvements et viols à Kavumu, opérés nuitamment, ont plus touché des filles mineures issues des familles pauvres, des familles monoparentales, etc. A l’en croire toujours, le phénomène est entretenu, entre autres, par des croyances superstitieuses selon lesquelles cet acte apporterait du pouvoir ou des richesses ou d’autres avantages aux criminels—auteurs directs ou commanditaires. Un autre facteur est le refus pour les victimes d’introduire des plaintes. De même, le manque de moyens d’actions aux acteurs pour la lutte contre ce phénomène a donc été un défi majeur, a indiqué Me Iragi.

Le Directeur Adjoint du BCNUDH est d’avis qu’il faut renforcer les dispositifs communautaires de protection. Pour lui, « la communauté elle-même devrait pouvoir puiser dans ses ressources et dans les mécanismes qui existent pour, davantage, offrir un niveau de protection approprié aux membres de la communauté. »

L’analyse sociologique faite lors du forum par Antoine Cimenesa Bishweka, chercheur au Centre d’Etudes et de Recherche pour la Promotion Rurale et la Paix (CERPRU) et chef des Travaux à l’Institut Supérieur de Développement Rural (ISDR)/Bukavu, a confirmé les propos des précédents intervenants. Antoine Bishweka soutient également que, considérant la précision de leurs actes, les auteurs des enlèvements et des viols sur ces mineurs ne sont pas étrangers à Kavumu mais des fils du terroir.

Pour sa part, le chef du Parquet de Kavumu s’est interrogé si le silence des familles des victimes n’est pas acheté, et donc coupable. A la tête du parquet de Kavumu depuis 2012, Kazembe Ngoy partage qu’ « il y a une corrélation entre les violeurs et les parents des victimes. »

Au nombre des recommandations convenues, l’on peut citer l’implication des services de sécurité et des renseignements y compris l’équipement de ces derniers en nombre suffisant, le cantonnement des militaires en vue de la réduction de leurs mouvements dans les quartiers de Kavumu, la conduite des enquêtes approfondies, l’arrestation des auteurs et la tenue des procès selon la loi, la création d’emploi pour les jeunes, la conjugaison des efforts des Nations Unies avec les leaders locaux, la dénonciation des criminels par la population, etc.

Il convient de noter que, à côté de l’appui aux enquêtes policières et le suivi judiciaire, le forum sur le phénomène d’enlèvements et viols sur mineurs à Kavumu est l’une des démarches entreprises par des structures de promotion des Droits de l’Homme dont le BCNUDH pour essayer d’endiguer ces violences basées sur le genre.