Alan Doss quitte la RDC sur une « note de satisfaction »

7 juil 2010

Alan Doss quitte la RDC sur une « note de satisfaction »

Kinshasa, 30 juin 2010 - Le Représentant spécial sortant, Alan Doss, a participé aux célébrations du Cinquantenaire de la RDC avant d'accueillir au quartier général de la MONUC le Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, pour le dévoilement de la plaque de la MONUSCO. Il a ensuite quitté Kinshasa, qui restera son dernier poste, pour entamer sa retraite. La semaine dernière, il avait reçu Radio Okapi et le site Web de la Mission pour faire part de quelques réflexions sur son exercice. Moments choisis.

Q : Monsieur Doss, vous êtes le Représentant spécial du Secrétaire général de l'ONU auprès de la mission des Nations Unies en RDC, vous êtes fin mandat, et cela correspond aussi à la fin du mandat de la MONUC qui laissera la place à la MONUSCO (Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en RD Congo) au 1er juillet, est ce que vous pouvez nous retracer votre parcours dans le système des Nations Unies?

R : Alors tout de suite après avoir quitté l'université, je suis entré aux Nations Unies à travers le PNUD. J'étais affecté à Nairobi en 1966, et c'est de là que j'ai fais pas mal de postes à travers le monde, en Afrique, en Asie, en Europe, au siège bien sûr, et dans plusieurs départements des Nations Unies. A la fois le développement, l'humanitaire, mais aussi la politique et la sécurité.

Q : En Afrique vous avez travaille dans quels pays?

R : En Afrique, j'ai fait bien sûr le Kenya, j'ai fait le Niger, le Benin, le Congo deux fois, la Sierra Leone et le Libéria. (...) En Cote d'Ivoire, j'ai oublié parce qu'il y a tellement de pays, j'ai passé prés de deux ans pendant la crise (...), avec la mission de maintien de la paix.

Q : C'est depuis octobre 2007 que vous êtes au Congo comme Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies. Aujourd'hui, près de trois ans après, quel bilan faites-vous de votre mandat au Congo?

R : Je laisse aux autres de dresser le bilan, je pense aux journalistes et aux historiens. Moi personnellement, je quitte sur une note de satisfaction. Je pense, on a vu du progrès surtout par rapport la situation que j' (avais) trouvé en arrivant. N'oublions pas que c'était en moment qu'il ya eu une crise à Goma, surtout l'échec de l'effort contre le CNDP a Mushake. Je pense l'ambiance était vraiment très tendue. Heureusement on a fait tout de suite la conférence de Goma, on a eu un certain succès, mais malheureusement la situation s'est encore détériorée comme on sait. Mais en général, je dirai que par la suite on a pu trouver des voies et des moyens d'améliorer notre coopération avec les autorités et le gouvernement. Mais surtout, et ça on doit reconnaitre, le courage politique du chef de l'Etat d'avancer le rapprochement avec les voisins et aussi d'intégrer certains éléments dans les FARDC (...) c'est un travail qui est toujours en cours, mais en général je pense que c'était la bonne décision et que nous sommes aujourd'hui dans une situation nettement mieux qu'il ya deux, trois ans. Et ce n'est pas moi qui le dis. Tout récemment, j'ai eu une collègue du siège (de l'ONU) qui est venu à plusieurs reprises il ya quelques années, et elle vient de faire une tournée notamment à l'Est. Elle a constaté vraiment une nette amélioration dans la sécurité bien sûr, et une reprise économique surtout dans les chefferies des provinces. Mais on ne peut pas être complaisant, il reste toujours beaucoup de problèmes : la situation au Nord Kivu est souvent très volatile et nous devons continuer avec cet effort.

Q : Vous quittez donc la RDC la tête haute?

R : Oui, tout à fait, grâce je dirai aux efforts bien sur de notre staff, notre personnel. Ce n'est pas moi tout seul, c'est une mission. Et je le dis souvent, il n'y a rien de spécial dans un représentant spécial, sans le staff, sans le personnel. J'ai eu vraiment un staff, un personnel, y compris Okapi et toute la division de l'information, remarquable.

Q : La MONUC a-t-elle rempli sa mission sous votre mandat?

R : Je pense, mais le mandat change, et c'est normal, parce que la situation dans le pays a beaucoup changé depuis 10 ans au moment où la MONUC a été créée. Il ya une évolution très importante dans ce pays. Rappelons-nous où le pays était il ya deux/trois ans. Divisé en quatre avec huit armées étrangères, avec plus de 60 groupes armés, milices, ainsi de suite. Donc quand on voit maintenant la situation, même s'il y a encore des difficultés, des problèmes, il faut reconnaitre aussi le chemin qui a été traversé. Parce que sans ce progrès, je ne pense pas qu'on aurait été en mesure de faire cette transition vers la MONUSCO.

Q : Parlons du plan sécuritaire, quel bilan dressez-vous du travail des forces onusiennes sur le sol congolais?

R : Ils ont fait vraiment un travail remarquable, et je pense que ce n'est pas toujours connu. Par exemple aujourd'hui, ils sont vraiment dans les coins les plus isolés. Dans des petites bases temporaires, où ils vivent vraiment avec la population. Et la population apprécie énormément cette présence, donc je pense la force a fait un travail comme je dis remarquable. Aujourd'hui il y a des centaines, voire des millions des personnes qui ont pu rentrer grâce à l'appui apporté par les forces (onusiennes). (...) Il faut reconnaitre aussi que les FARDC ont quand même fait un travail très difficile. Dans des conditions difficiles. Mais aussi que les autorités, les dirigeants politiques, ils ont tous contribué. La paix n'est jamais le résultat d'un seul effort, c'est le résultat d'un effort conjugué entre plusieurs partenaires, bien sur les Congolais, mais aussi la communauté internationale, y compris la MONUC et nos forces militaires.

Q : Peut-on dire qu'il ya une forte amélioration?

R : Rappelons-nous encore qu'au début, lorsque la MONUC a commence ses activités, c'était un petit groupe d'observateurs militaires. C'est par la suite que le Conseil de sécurité a autorisé un renforcement des dispositifs en moyens, mais aussi en effectifs. Donc je dirai que c'est une force qui a évolué au fur et à mesure que la situation a évolué, et bien sûr, nous sommes très concentrés maintenant sur l'appui à la protection de la population.

Q : Et concernant les questions de conduite et de discipline au sein de la Mission, quel constat pouvez-vous faire?

R : Bon deux choses : d'abord évidemment nous déplorons s'il y a (eu) des incidents qui (ont impliqué) notre personnel, et je parle du personnel entier de la MONUC. Militaires, police, mais aussi civils, on a tous les mêmes responsabilités, et en particulier en ce qui concerne l'abus sexuel. La deuxième chose que je constate, c'est que le nombre d'allégations (de mauvaise conduite) pendant mon mandant au moins a beaucoup diminué, parce que nous avons fait un effort ensemble avec le Commandant de la force, avec le Chef de la police de la MONUC, mais aussi avec nos collègues civils, de sensibiliser sur le comportement qu'on attend de nos effectifs ici en République Démocratique du Congo. C'est un travail qui doit continuer. Nous devons chaque année sensibiliser tous les militaires qui arrivent, tous les policiers, et bien sur les civils. Mais en général je dirai que le nombre d'allégations a été sensiblement réduit, et j'espère que ca va continuer.

Q : Quelles sont les mesures que vous avez prises pendant votre mandat pour lutter contre l'exploitation et l'abus sexuel, et également les autres formes de mauvaise conduite dans la Mission?

R : Je pense ca passe par deux voies. D'abord la sensibilisation: tout le monde doit être au courant de quelles sont nos réglementations en la matière. Ils doivent savoir par exemple que pour nous, la prostitution est exclue. Nous considérons ça comme une forme d'abus sexuel. Même si ce n'est pas le cas dans d'autres pays, pour nous Nations Unies, lorsque vous commencez votre service au Nations Unies, vous êtes censés respecter le règlement des Nations Unies. Donc nous avons fait beaucoup d'effort de sensibiliser encore toutes les catégories de notre personnel - militaire, civil et policier - pour qu'il sache quelles sont nos attentes, quelle est notre politique dans la matière.

Deuxième chose, nous avons beaucoup insisté sur l'investigation rapide, s'il y a des cas. Ca peut être fait par l'Office de l'investigation, qui ne dépend pas du tout de moi. Ils peuvent autoriser et conduire des investigations sans mon autorisation, et ils le font d'ailleurs. Et par la suite, le cas échéant, nous insistons sur des sanctions, et nous avons pris des sanctions contre des militaires, mais aussi des civils et des policiers. Donc, c'est un ensemble de mesures, et surtout il ne faut pas relâcher nos efforts, il faut continuer d'insister sur ce message absolument vital de « Tolérance zéro ».

Q : La fin de votre mandat correspond à la fin du mandat de la MONUC, pour laisser la place à la MONUSCO. Quelle sera le mandat de cette nouvelle Mission au Congo?

R : Il y aura deux piliers du mandat. D'abord un appui pour la protection des civils, (c'est la continuation) de notre mandat actuel, mais ça reste toujours un rôle très important. Bien sûr appuyez les efforts de sécurité nationale, les efforts de l'administration congolaise, nationale et provinciale. Et travailler aussi avec la société civile, ainsi de suite. Deuxième pilier - et ça c'est relativement nouveau - c'est de maintenant appuyer la consolidation de la paix passant par la stabilisation. Parce que le Conseil de sécurité a reconnu - même s'ils ont dit que la situation au Congo a beaucoup évolué depuis 10 ans - il faudrait que la mission s'adapte à cette réalité et s'oriente vers cet effort de renforcement des capacités nationales à travers la consolidation de la paix et la stabilisation. Donc voilà de manière très rapide les essentiels de notre programme. (...) Tout de suite, on ne va pas remarquer un changement, mais ce qui est important c'est l'intention, marquer ce passage, que de plus en plus on doit sortir des urgences, des crises pour aider les autorités. A mettre le pays fermement sur la voie du développement économique et social, et ça passe par la protection (des civils), la stabilisation, voire la consolidation de la paix.

Q : Et quels sont, selon vous, les défis que la MONUSCO aura à relever?

R : Il y a bien sûr des zones où il y a des conflits, notamment les Kivus et la province Orientale, mais aussi je pense il y a des domaines (qui font) maintenant partie de la consolidation de la paix (comme) la restauration de l'autorité de l'état. Je pense que c'est très important, on aide les autorités et c'est l'objectif par exemple du programme STAREC de ramener l'autorité de l'état, la police, la justice, mais aussi d'aider dans la mesure du possible avec d'autres activités essentielles de la stabilité, à savoir la réparation des infrastructures. Nos unités de génie militaire sont en travail, par exemple, dans plusieurs parties du pays notamment encore dans les Kivus et l'Orientale dans la construction des routes. Maintenant, on a une équipe de l'Indonésie par exemple qui travaille entre Dungu et Faradje pour améliorer la route. Nous avons une équipe de Bangladesh et de la Chine travaillant sur la route à Shabunda et à Mbenga etc. Donc il ya tout un ensemble de mesures qui sont en cours, et je pense nous pouvons renforcer ces actions. Je vous cite un autre exemple parce que je trouve que ça donne une bonne illustration de ce que j'essaye d'expliquer. Nous avons ensemble, avec un don du gouvernement britannique, remplacé le pont sur le fleuve Ituri à Mombassa avec le génie militaire du Népal. Avec cette œuvre, on a pu (rouvrir) la route entre Kisangani (et) Mombassa, pour la première fois depuis plusieurs années (...) et la voie directe pour l'approvisionnement de Kisangani. Je pense que c'est une illustration (de la) stabilisation et (de la) consolidation de la paix, parce que ça va aider maintenant Kisangani à revivre sur le plan économique.

Q : Parlons de la restauration de l'autorité de l'Etat. A ce jour, est ce qu'on peut dire que l'autorité de l'Etat est restaurée sur toute l'étendue de la RDC?

R : Oui la grande partie, c'est clair, mais il y a des territoires où ce n'est pas encore le cas. Notamment ou il ya des groupes armés qui doivent être démantelés, démobilisés, et le cas échéant, (retournés) dans leur pays d'origine. Mais avec ça, il faut absolument qu'il y ait une présence policière pour éviter que d'autres groupes armés se matérialisent, et ça c'est le défi. Je pense qu'on est en bonne route. Nous devons reconnaitre le rôle clé des FARDC (...) pour les aider à faire face à ces groupes et je dois dire que les FARDC ont fait beaucoup. Oui on parle des mauvaises actions des FARDC, mais les dirigeants sont très au courant. Et à chaque fois maintenant (...) ils ont pris des mesures. Il reste à faire et c'est pour cela, je crois, que dans cette prochaine phase de la MONUSCO, nous devons continuer avec ce fort appui à la réforme du secteur de sécurité.

Q : On parle de la réduction des effectifs de la MONUC avec la nouvelle Mission MONUSCO, cette réduction se fera-t-elle à la fois pour les civils et les militaires?

R : En premier lieu, pour les militaires. Nous avons déjà commencé. (Le 16 juin) nous avons fait un premier départ avec le contingent sénégalais qui est parti de Kisangani et d'autres vont suivre. Mais nous nous sommes mis d'accord avec les autorités, suivant les indications de la résolution 1925 adoptée par le Conseil de sécurité que ça doit se faire sur la base des évaluations que nous sommes maintenant en train d'organiser avec les autorités. Donc j'espère que ça se fera au fur et à mesure que la situation évoluera. La MONUC ni la MONUSCO ont intérêt de garder des effectifs inutilement ici si la situation devient stable. Si la protection est assurée, bien sur nous ne voulons pas trainer, parce que malheureusement il y a beaucoup de crises à travers le monde, et les Nations Unies et les Casques bleus sont souvent appelés à intervenir.

Q : Et à ce jour, combien de Casques bleus de la MONUC ont déjà quitté la RDC?

R : Bon je ne pense pas que je vais entrer dans tous les détails, mais nous avons déjà un bataillon qui est parti et, comme je vous ai indiqué, d'autres vont suivre au fur et mesure. Nous nous sommes mis d'accord avec le gouvernement sur un processus, et nous suivons ce processus actuellement.

Q : Comment entrevoyez-vous l'avenir de la MONUSCO au Congo?

R : Je vous ai déjà parlé d'une transition dans notre mandat, qui est déjà reflété dans la (résolution) 1925, avec un accent qui sera de plus en plus évident sur la consolidation de la paix et sur la stabilisation. Ca ne va pas se voir tout de suite, ça prendra du temps évidemment, mais c'est ça l'ambition pour reconnaitre l'évolution du pays. Je pense qu'il y aura d'autres taches pour nous par exemple d'appuyer les efforts sur le plan logistique, technique, les élections qui sont prévues pour l'année prochaine. Le cycle électoral a déjà commencé avec la mise à jour des fichiers électoraux (...) Donc il y a un ensemble d'appuis que nous envisageons, mais tout est de plus en plus vu sous l'optique de la consolidation de la paix, à travers la stabilisation.

Q : Certains observateurs pensent que la RDC sera mise sous tutelle de la MONUSCO, comment répondez-vous à ces personnes?

R : Non je ne pense pas. Au contraire. Il faut reconnaitre que nous travaillons avec les autorités (congolaises) et que nous avons beaucoup insisté, le Conseil de sécurité et moi-même, c'est un partenariat. Nous sommes là pour appuyer les efforts nationaux, pas pour les remplacer, et je pense qu'il est clair que les autorités ont la responsabilité. Et ce n'est pas à nous à nous substituer. C'est pas comme ça que ça pourrait marcher, nous ne sommes pas une force coloniale, nous ne sommes pas une force d'occupation. Nous sommes là à la demande du gouvernement et du peuple Congolais, même si on ne partage pas toujours la même appréciation sur une situation, c'est normal. Dans toute mission de maintien de la paix, il y a toujours ce va-et-vient avec les autorités.

Q : La RDC fête son cinquantenaire. Déjà au lendemain de son indépendance, on retrouvait une force onusienne sur le sol congolais pour pacifier le pays. Cinquante ans après, on retrouve encore une force de maintien de la paix sur le sol congolais. Comment analysez-vous ces deux situations qui semblent être presque similaires?

R : Je pense qu'elles ne sont pas similaires. Ce qui est arrivé après l'Indépendance était lié au contexte du moment, y compris d'ailleurs la guerre froide qui a trouvé un peu son expression ici au Congo. Aujourd'hui, nous sommes vraiment dans une situation totalement différente. Il y a des structures et des capacités nationales qui n'existaient pas à ce moment là. Donc la situation a beaucoup évolué. C'est vrai après la chute du régime de Mobutu, le pays a connu beaucoup de difficultés, avec aussi les problèmes dans les pays voisins, et d'autres groupes armés qui ont traversé la frontière et qui sont toujours là en quelque sorte. La LRA par exemple, aussi bien que les FDLR. Donc il y a un ensemble des choses qui a mon sens rendent la situation aujourd'hui totalement différente que ce que c'était en 1960. (...) En 1960, c'était une question de survie du pays à ce moment là. Aujourd'hui ce n'est pas le cas. Oui, effectivement, il y a dix ans le pays était partitionné, mais quand même on a pu surmonter cette difficulté. Donc il ya eu cette évolution et je pense nous devons saluer le fait que les Congolais veulent rester Congolais.

Q : Est-ce juste une coïncidence?

R : Non je dirais que 50 ans c'est toujours le moment de réfléchir, mais je dirais aussi qu'un grand pays (ne s'est) pas fait en 50 ans. Mais aussi, il faut remarquer qu'il n'y a pas un grand pays du monde qui n'est pas passé par des crises, parfois existentielles. Je pense qu'il faut avoir quand même parfois une perspective historique.

Q : Comment se présentent les relations aujourd'hui entre les autorités congolaises et la MONUC?

R : Bon à travers mes contacts, mes visites d'adieu ou d'au-revoir, j'ai toujours été bien reçu, y compris par le Chef de l'Etat lui-même, le premier ministre aussi, et partout j'ai eu des remerciements et la reconnaissance du travail qu'on a fait ensemble. Parce que ce n'est pas (uniquement) la MONUC, on travaille dans un pays souverain pour appuyer les autorités et je pense qu'il y a eu cette appréciation de notre travail. Certes, il y a des hauts et des bas, c'est dans la nature des choses. Mais ce qui est important, c'est la tendance, où on va, parce que parfois quand on fait un voyage, ce n'est pas toujours en ligne droite. Il faut s'attendre parfois à des déviations. Mais ce qui est important, c'est qu'on ne perde pas notre objectif final.

Q : Aujourd'hui pensez-vous que la RDC est assez mûre pour amorcer son développement?

R : Le développement est déjà amorcé dans plusieurs parties du pays. Bien sûr, ce n'est pas partout, et notamment les zones touchées par le conflit. Mais quand je suis à l'est par exemple, vous voyez quand même pas mal de développement économique, notamment à Bunia, Butembo, Bukavu, Goma. Il y a beaucoup d'activités économiques. On voit des investissements. Maintenant ce qui est important, c'est que cet effort ou bien cette tendance s'élargisse à l'intérieur. Il faut encourager l'investissement dans ce pays, c'est pour moi le grand défi. C'est justement la bataille pour le développement économique et social. C'est un pays, comme tout le monde le dit, avec du potentiel, une potentialité légendaire. Réaliser cette potentialité maintenant, c'est le grand défi. Réaliser bien sûr pour le bénéfice du peuple Congolais.

Q : Aujourd'hui vous quittez la RDC, quelle image garderez-vous de ce pays et des Congolais?

R : La même image que j'ai eue lorsque j'ai quitté le pays... il ya plus de vingt ans. C'est la deuxième fois que je suis dans ce grand pays. Une image d'un peuple très hospitalier. J'étais reçu partout ici. Un peuple qui a énormément de créativité. Les gens malgré tout arrivent à faire beaucoup de choses qu'on ne reconnait pas parfois à l'extérieur. Parce qu'on a tendance à voir tout qui est mauvais, car beaucoup de monde souffre encore, c'est vrai, dans les zones affectées par des conflits et en particulier les femmes. Et la je profite aussi de saluer les femmes dans ce pays, pas parce que c'est politiquement correct, mais parce que j'ai vu ici comme ailleurs en Afrique, des femmes vraiment remarquables, dans ce qu'elles font etc. Et c'est ça l'image que j'emporte encore de ce pays. Un pays qui a un avenir, un pays qui a un destin - a mon sens - régional, mais aussi mondial.

Q : Quand votre remplaçant arrivera t-il au Congo?

R : Il arrive bientôt. Et vous savez, c'est quelqu'un de très expérimenté. L'Ambassadeur Meece connait bien le Congo. Il était deux fois en poste ici, mais il a aussi travaillé ailleurs en Afrique. Donc c'est vraiment quelqu'un d'une très grande expérience, et je suis certain qu'il sera très bien reçu par les autorités, par le peuple Congolais.

Q : Et vous, quand pensez-vous quitter le Congo?

R : Moi je quitte, je pense bien le 30 juin. Je serai là pour les festivités et bien sur pour accueillir le Secrétaire général M. Ban Ki-moon, ensuite je quitterai après les festivités.

Q : Vous quittez non seulement la MONUC, mais aussi les Nations Unies, est-ce pour prendre votre retraite?

R : Oui, tout à fait. Après plus de quatre décennies au service des Nations Unies, y compris près de 25 ans en Afrique dans différents postes, et près de 10 ans maintenant dans des missions de maintien de la paix. Donc c'est le moment je pense. C'est un bon moment, parce qu'on change de mandat, on crée une nouvelle mission. J'avais toujours l'intention, si on pouvait arriver à ce moment là, de prendre ma retraite.

Q : Parlons des festivités du 30 juin. Vous avez annoncé l'arrivée de M Ban Ki-moon qui va prendre part aux festivités du 30 juin. Est-ce que sa présence a une signification particulière?

R : Oui, tout a fait, parce que bon c'est pour marquer les 50 ans, pour marquer le partenariat avec le Congo et son gouvernement, le chef de l'Etat bien sûr qu'il connait bien, et aussi de marquer la transition de la MONUC à la MONUSCO. Rappelons nous que malheureusement un secrétaire général des Nations Unies a trouvé la mort dans le service de ce pays, à savoir Dag Hammarskjöld, il ya 50 ans. Donc je pense que les liens entre les Nations Unies et le Congo sont très profonds et « nous sommes (pour citer, si je peux, les mots du chef de l'Etat) tous dans le même bateau », et je pense on va continuer dans le même bateau.

Q : Nous sommes à la fin de notre entretien, un dernier message aux Congolais?

R : Je voudrais vous remercier et encore répéter que j'ai toujours été très bien reçu partout ici. Je sais parfois il y a des moments très difficiles, voire désespérés, mais (les Congolais) ont le courage de surmonter ces difficultés et je suis convaincu que tôt ou tard le Congo va trouver sa place dans les grands pays du monde.