Djugu : symbole du vivre-ensemble pacifique entre communautés, le marché de Dzudda rouvre
Il n'a l'air de rien, cependant ce bout d'espace commercial représente beaucoup pour les communautés Hema et Lendu de la localité de Dzengele, dans le territoire de Djugu, en Ituri. Le marché de Dzudda permet aux membres de ces deux communautés d’échanger, de faire les affaires, de se parler, de vivre ensemble pacifiquement. Il y a environ deux mois, à la suite de conflits communautaires qui ont engendré des violences opposant les groupes armés locaux Codeco et Zaïre, le marché avait dû fermer.
Les violences armées avaient fait de nombreux morts et occasionné des déplacements de populations, suivis de pillages de leurs biens, mettant ainsi à mal le vivre ensemble et la cohésion sociale prônés aussi bien par les autorités que par la MONUSCO. Les conséquences de cette fermeture étaient tout aussi économiques que sociales : en l’absence d’échanges commerciaux, et incapables d’écouler leurs produits agricoles, les populations des deux communautés se sont retrouvées presque sans sources de revenus, fragilisant un peu plus des habitants déjà paupérisés par de longues années de guerre.
Médiation de la MONUSCO
La Mission onusienne, à travers sa section des Affaires civiles, n’est pas restée indifférente face à cette situation. Le 27 avril 2025, elle réunissait les deux parties pour faciliter la reprise du dialogue entre les deux communautés et pour échanger sur la nécessité de rouvrir ce marché, au nom de la cohabitation pacifique. A la suite de cette rencontre, les notables Hema et Lendu ont finalement résolu de renouer le dialogue rompu et opté pour la reprise des activités commerciales au marché de Dzudda.
« Nous, les Hema, sommes très contents de la médiation faite par la MONUSCO, parce que nous-mêmes, on était incapables de coordonner ce dialogue. La cohabitation avec nos voisins Lendu, c'est maintenant une réalité. [Jeudi], pendant la réouverture du marché, les membres des deux communautés ont mangé et bu ensemble pour sceller ces retrouvailles, et cette cohésion sociale », a déclaré Grégoire Logo Bamaraki, le président des jeunes de Bahema Nord.
De son côté, le secrétaire administratif du groupement de Laudjo, Innocent Lomboni Kpadyu, se réjouit de cette réouverture qui va relancer les activités économiques dans la région, tout en favorisant le vivre-ensemble entre communautés locales : « Nous sommes très contents de cette rencontre initiée par la MONUSCO. Ce marché ravitaillait beaucoup d’habitants des secteurs de Walendu Pitsi, Tatsi et Datsi, ainsi que la chefferie des Bahema Nord. De nombreux commerçants vont désormais venir y vendre leurs marchandises et cela va aider la population à gagner un peu d’argent. Ce marché aide grandement les deux communautés qui vivent désormais ensemble et dialoguent. Nous sommes très contents de sa réouverture ».

Bien plus qu’un simple marché
Le marché de Dzudda constitue un centre économique d’intérêt stratégique pour la région. Il favorise le rapprochement des populations marchandes ainsi que des notables des secteurs de Walendu Djatsi, Tatsi, Pitsi, ainsi que de la chefferie des Bahema Nord et une grande partie de la chefferie des Bahema Badjere. Ce point de vente nourrit également la ville de Bunia, située à 80 km, ainsi que des villages riverains du lac Albert en produits agricoles.
Avec la réouverture de ce marché, nombreux sont les habitants désormais libres de circuler quelle que soit leur appartenance communautaire, ce qui permet de désenclaver certaines entités. Les deux communautés ont convenu d’aller à la rencontre des leaders des groupes armés pour les sensibiliser à instruire leurs hommes d’arrêter de s’attaquer aux civils et de préserver la paix et le vivre-ensemble dans la région. « Nous ne voulons plus être déstabilisés par nos groupes armés locaux, c'est pourquoi des sensibilisations ont déjà commencé pour leur demander de ne plus attaquer les populations civiles », a affirmé Grégoire Logo Bamaraki, le président des jeunes de Bahema Nord.
