A Mutarule, les retournés entre frustration et résignation!

23 sep 2015

A Mutarule, les retournés entre frustration et résignation!


Uvira, le 16 septembre 2015

– Un mois après, jour pour jour après les premiers retours des déplacés à Mutarule, plusieurs retournés affirment ne pas voir clair dans leur avenir; ils se disent déçus, d’autres parlent d’abandon. Déçus, à cause des « promesses non tenues ». Abandonnés par presque tous, « à l’exception notable de la MONUSCO», dit une maman vendeuse de lait de vache, une des rares retournées à avoir une petite activité génératrice de revenus…

Car à Mutarule, du lever au coucher du soleil, les retournés se tournent les pouces; quelques jeunes s’adonnent à l’abattage d’arbres pour vendre du bois, mais même cela ne suffit pas! Certains vont même jusqu’à regretter d’être retournés chez eux. Car « après nous avoir donné toutes les garanties pour ce retour, nous nous retrouvons abandonnés à nous-mêmes aujourd’hui », déclare Kenge Kimanuka, la trentaine révolue. Et de se demander « si le Gouvernement est au courant de nos difficultés… » ! « Car les seules fois où des autorités sont venues ici, c’est avec et grâce à la MONUSCO. Ce qui n’est pas le cas pour la Monusco dont les agents sont ici chaque jour ».

Mais pour autant, ces retournés – plus de 470 familles contre un peu plus de 350 il y a trois semaines – ont aussi des griefs contre la Mission des Nations Unies au Congo. Car, si la sécurité a été améliorée sur place et grâce au renforcement des effectifs de la Police congolaise et des FARDC, ou encore à travers le changement à la tête des Unités de commandement de ces deux forces de défense, si la Monusco a installé en plein cœur du village une Base militaire opérationnelle, en revanche, les retournés de Mutarule reprochent à la MONUSCO de tarder à réaliser ses autres promesses; notamment en matière de micro-crédits, de réhabilitation du centre de Santé et de l’école du Village ou de construction d’un marché. Ils rappellent par ailleurs que lors de ses différentes visites à Mutarule, Martin Kobler, Chef de la MONUSCO et Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies en RDC s’était engagé à « frapper à la porte des humanitaires pour plaider la cause de Mutarule… Mais à ce jour, aucun humanitaire, aucune ONG n’est venue nous aider… ». De fait, lors de sa dernière visite à Mutarule le 24 août 2015, Martin Kobler avait exprimé sa « déception » face au peu de réactivité des humanitaires…

La rencontre de ce matin entre la Section de l’Information publique de la Monusco-Uvira et les retournés de Mutarule a servi de séance d’explication et d’occasion pour le responsable de l’Information publique de la Monusco-Uvira de rappeler à ses interlocuteurs ce qu’est la Monusco: à savoir une Mission de maintien de la paix; ce qu’elle n’est pas: une agence de développement ou humanitaire. Ou encore les acquis obtenus avec l’appui de la Monusco: deux puits d’eau construits à travers les Projets à Impact Rapide (QIP), le renforcement de la sécurité dans et autour du Village, la mise sur pied d’un Comité local de protection, le plaidoyer auprès du Gouvernement en vue de l’augmentation des effectifs de la Police et des FARDC, ou encore la mise sur pied d’un Comité des Sages à Mutarule I et Mutarule II chargé de réfléchir sur les relations inter-communautaires. Mais comme les retournés eux-mêmes l’ont reconnu, tous ces efforts ont besoin d’être accompagnés par des projets de développement susceptibles d’aider la communauté à lutter contre le chômage et la pauvreté. Une tâche dévolue à d’autres acteurs qu’à la MONUSCO!

Jean-Tobie Okala