Nord-Kivu : la MONUSCO évalue la situation sécuritaire dans le sud-Lubero en vue d’une réponse adaptée

Nord-Kivu : la MONUSCO évalue la situation sécuritaire dans le sud-Lubero en vue d’une réponse adaptée. Photo MONUSCO/Michael ALI

27 juil 2020

Nord-Kivu : la MONUSCO évalue la situation sécuritaire dans le sud-Lubero en vue d’une réponse adaptée

Sy Koumbo S. Gali

S’imprégner de la situation sécuritaire et humanitaire dans la partie sud du territoire de Lubero, en vue d’y apporter une réponses appropriée, c’est l’objectif de la mission menée du 20 au 25 juillet 2020 par la MONUSCO dans cette partie de la province du Nord-Kivu confrontée, ces derniers mois, aux affrontements récurrents entre groupes armés. 

La délégation de la MONUSCO a sillonné des villages et cités du Sud-Lubero, notamment Lubero, Luofu, Miriki, Kanyabayonga, Kirumba, Kamandi et a échangé avec les acteurs locaux sur la situation qui y prévaut.

Depuis plusieurs mois, des coalitions de groupes armés se battent pour le contrôle de plusieurs villages des groupements Itala (Lubero) et Ikobo (Walikale). Ces groupes armés se livrent à des tueries, kidnappings, pillages et d’autres violations des droits de l’homme. Un déplacement massif des populations vers des grandes agglomérations telles que Kirumba et Kanyabayonga est observé. Selon le bourgmestre de la commune de Kanyabayonga, à ce jour, plus de 3600 ménages de déplacés, soit près de 20.000 personnes s’entassent dans la commune de Kanyabayonga. La plupart vivent dans des familles d’accueil.

Dunga Resse,  président de la société civile de Kanyabayonga, souligne que les déplacés deviennent une lourde charge pour la population. « Vous savez que nous sommes dans la phase du coronavirus, la population est confinée, on va au champ rarement. Alors quand il faut prendre encore en charge des visiteurs qui viennent de Kateku, Mbuavinywa, ça pèse. Et donc, nous demandons que les jeunes qui sont encore dans ces groupes armés puissent se rendre, pour que la population puisse regagner son milieu et que la vie reprenne son cours normal ».

La situation des déplacés dans la région est d’autant plus grave qu’à Miriki par exemple, lors du passage de la délégation, le mercredi 22 juillet, le village enterrait ses morts : 4 personnes déplacées mortes, selon le témoignage des habitants, de malnutrition et d’absence de prise en charge adéquate en la matière.

Les acteurs de la société civile ont demandé à la MONUSCO d’intercéder auprès des humanitaires pour qu’une assistance appropriée soit apportée à ces déplacés.

L’insécurité dans la région pose un autre problème : la méfiance entre les populations qui accusent certains de laisser leurs enfants s’enrôler dans les groupes armés et de ce fait seraient devenus eux-mêmes complices de cette insécurité. C’est le cas à Kamandi où beaucoup de femmes accusées de ces faits, ont dû fuir la région pour se mettre à l’abri.

Sella Katembo, Secrétaire administratif de Kamandi dit ne pas comprendre cette réaction : « Les femmes souffrent ici. Ces jeunes qui tracassent la population dans les champs, notamment ces Mai-Mai, sont bien sûr les enfants de ces femmes. Mais, aucune femme, aucune mère ne peut envoyer son enfant dans la milice pour devenir un Maї-Maї ”. Il a demandé aux autorités provinciales et nationales ainsi qu’à la MONUSCO d’en finir avec toutes ces forces négatives « afin que nous respirions la liberté, et pour qu’on n’entende plus ce genre d’accusation là où nous vivons. ».

Bien que la situation demeure préoccupante, plusieurs redditions ont été enregistrées ces derniers temps, grâce à la sensibilisation entreprise par les autorités locales et la pression des FARDC et de la force de la MONUSCO sur ces groupes armés. La semaine dernière, au moins 36 combattants Maї-Maї se sont rendus aux FARDC à Kanyabayonga, avec un total de 22 armes. Le 19 juillet, trois autres volontaires venus du groupement Itala, avec une arme, se sont rendus à la MONUSCO, à Kanyabayonga.

La société civile de Kirumba, demande que le gouvernement prenne en charge ces jeunes sortis des groupes armés, en les encadrant : « Notre préoccupation est que le gouvernement congolais encadre bien ces jeunes. S’il s’agit de les réintégrer dans l’armée, il faut qu’il le fasse bien, et s’il s’agit de les démobiliser, qu’il puisse les accompagner aussi dans l’apprentissage des métiers pour qu’ils puissent intégrer la communauté. Car notre crainte est que l’on laisse ces jeunes sans encadrement et qu’ils deviennent encore une menace pour la communauté », a dit Blessing Kambere, président de la société civile de Kirumba.

A l’issue de la mission, plusieurs autres recommandations ont été formulées qui vont toutes, dans le sens du renforcement des effectifs des FARDC et des Casques bleus de la MONUSCO dans la région pour contenir, voire chasser ces groupes armés de la région afin que la protection des civils soit assurée.

 « Toutes les recommandations émises par les membres des Comités Locaux de Protection (LPC), les acteurs de la société-civile, les autorités locales, notamment les chefs traditionnels, la PNC, les FARDC permettront à la MONUSCO de trouver des réponses appropriées qui contribueront ainsi à améliorer la situation sécuritaire et assurer la protection des civils dans le sud de Lubero », a déclaré le chef de la délégation, Alain Muongo, de la Section des Affaires civiles de la MONUSCO.