Sud-Kivu : 51 combattants se sont rendus à la MONUSCO depuis janvier 2022 à Minembwe

Arrivée à Uvira au mois d’aout 2022 d’ex-combattants issus des groupes armés des hauts plateaux d’Uvira et de Fizi après sensibilisation au processus de DDRRR. Photos DDRRR/MONUSCO Uvira

12 sep 2022

Sud-Kivu : 51 combattants se sont rendus à la MONUSCO depuis janvier 2022 à Minembwe

Fiston Ngoma

Du 1er janvier au 6 septembre 2022, cinquante-et-un (51) combattants issus de groupes armés se sont volontairement rendus à la base de la MONUSCO à Minembwe, dans le Sud-Kivu, avec 31 armes AK-47. C’est le résultat d’une forte sensibilisation effectuée par la section Désarmement, Démobilisation, Rapatriement, Réinsertion et Réinstallation (DDRRR) de la MONUSCO dans les territoires d’Uvira et de Fizi/Itombwe. Parmi ces ex-combattants figuraient neuf enfants qui ont été remis à la section de Protection de l’enfant de la MONUSCO.

Onze (11) ex-miliciens attendaient encore en date du 9 septembre 2022 la suite du processus au centre de transit de DDRRR MONUSCO à Kavimvira, dans la ville d’Uvira, tandis que les autres ont quitté ce lieu où ils avaient été transférés puis gardés 48 heures. En plus de l’hébergement, ils ont pu y bénéficier de nourriture, médicaments et kits de voyage constitués de vêtements, chaussures, ainsi que de frais de transport afin de rejoindre leurs familles.

A leur sortie, les ex-combattants ont reçu des certificats provisoires de désarmement contresignés par les FARDC et la MONUSCO.

Selon le major Jean Kongolongo, officier de liaison FARDC-MONUSCO pour le compte du secteur opérationnel SOKOLA 2 au Sud-Kivu, ce certificat provisoire de désarmement permet à l’ex-combattant de prouver « qu’il a remis son arme après reddition et qu’il n’a plus de lien avec un quelconque groupe armé. Il peut le présenter à la police judiciaire pour obtenir une attestation de perte de pièces qui tient lieu de pièce d’identité pour lui ».

Record de redditions

Ces ex-combattants proviennent essentiellement des groupes Twirwaneho et Gumino, dans les hauts plateaux du territoire de Fizi, à Minembwe. Ce record de reddition fait suite à une campagne de recrutement forcé des jeunes, dont des élèves scolarisés, par des seigneurs de guerre dont Sematama, l’adjoint du groupe Twirwaneho, et son commandant le colonel Michel Makanika, déserteur de l’armée, durant les mois de juin, juillet et aout derniers. Ce recrutement avait coïncidé avec la clôture de l’année scolaire, la fermeture des écoles et le début des grandes vacances dans la région. Des jeunes, dont certains mineurs mais aussi des parents, avaient été enlevés et emmenés dans la brousse, contre leur gré.

Des membres de leurs familles avaient alors contacté la section DDRRR/MONUSCO pour faciliter la reddition volontaire de leurs proches. A la suite d’une mobilisation au sein de la communauté locale, des sensibilisations ont été menées afin d’encourager ces nouvelles recrues à quitter la brousse.

Peur des représailles

Parmi ces ex-combattants, plusieurs ont choisi de ne pas retourner à Minembwe, ni dans leurs villages d’origine, par peur de représailles de la part des groupes armés qu’ils ont quittés. Ils préfèrent s’installer à Uvira, Bukavu ou encore à Goma, dans le Nord-Kivu, où ils ont de la famille.

« Au regard de ce que j’ai vécu là-bas dans la brousse et surtout que j’ai rendu mon arme à la MONUSCO, si je retourne là-bas à Minembwe, on risque de me tuer. C’est pourquoi nous nous sommes rendus à la MONUSCO pour qu’elle nous aide à rejoindre nos parents qui s’étaient enfuis vers Goma, au Nord-Kivu, pendant les hostilités à Minembwe », témoigne Prince Ndahizeye, 25 ans, qui a quitté le groupe armé Gumino. Ce dernier opérait dans la zone de Kawela, dans les hauts plateaux.

Des ex-combattants issus des groupes Maï Maï Buhirwa et autres sont cependant retournés dans leurs villages respectifs sous le statut de civil. Ndumwe Kahiri était connu sous le sobriquet « Noir ». Cet ancien commandant de police militaire du groupe Maï Maï Buhirwa, âgé de 35 ans, a préféré retourner chez lui à Ndolera, dans les moyens plateaux surplombant le groupement de Luvungi, chefferie de Bafuliiru, en territoire d’Uvira. « J’ai annoncé à mon chef, le général Buhirwa, que je voulais quitter la brousse pour rejoindre mes parents, rester à coté de mon épouse et mes enfants. Et il ne s’y est opposé. Je viens de passer dix annees dans la brousse, je n’ai rien gagné. Pour survivre, on devait faire enlever des habitants, braquer des véhicules et voler du bétail. Je voudrais dire qu’on faisait contre notre volonté. Je rentre chez moi », a-t-il déclaré.

Absence de structure locale du PDDRC-S 

Malheureusement, aucune structure locale du Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (PDDRC-S) du gouvernement congolais n’est encore disponible à Uvira et à Fizi. Ce programme national devait prendre le relais après la sortie des ex-combattants du site de transit de la MONUSCO.

L’absence d’une administration étatique officielle à Minembwe pour porter la responsabilité des actions menées en appui au gouvernement congolais constitue aussi une difficulté pour la mise en œuvre de ce processus de désarmement.

En attendant, la MONUSCO a lancé la réalisation de trois projets de réduction des violences communautaires (CVR) dans la région, au bénéfice des anciens combattants mais aussi des personnes vulnérables et à risque, notamment des femmes et des jeunes. 

Il s’agit d’un projet d’adduction d’eau potable par l’aménagement d’une source et du raccordement de bornes-fontaines à Madegu, dans Minembwe-centre ; de la réhabilitation de la route de desserte agricole qui va de Minembwe-centre jusqu’à Mikenge (soit 43 km) ; ainsi que de la route reliant Minembwe-centre au pont Lwiko (soit 7 km).

« Ces projets ont permis d’injecter de l’argent dans l’économie locale par l’utilisation de la main d’œuvre locale parmi laquelle des ex-combattants issus des groupes armés sans distinction de tribu, des jeunes à risque et des femmes vulnérables de la région », s’est félicité Alphonse Mugoyi, officier de la section DDRRR de la MONUSCO.

Après trois ans d’enclavement, les deux tronçons routiers, rendus praticables, ont été réouverts à la circulation début septembre 2022. Ces projets ont été financés par la MONUSCO à hauteur de 200.000 dollars américains.