CONFERENCE DE PRESSE MONUSCO MERCREDI 21 JUILLET 2010

22 juil 2010

CONFERENCE DE PRESSE MONUSCO MERCREDI 21 JUILLET 2010

Madnodje Mounoubai, porte-parole : Bonjour, mesdames. Bonjour, mesdemoiselles. Bonjour, messieurs. Bonjour à nos fidèles auditeurs de la Radio Okapi qui nous suivent en direct. Bienvenus à notre rendez-vous hebdomadaire de tous les mercredis. Aujourd'hui, nous avons avec nous un invité spécial en la personne du général Gaye, le Commandant de la Force de la [MONUSCO]. Comme vous le savez, le général Babacar Gaye est en fin de mission, et il a tenu à être avec vous avant de quitter cette Mission. Mais avant de lui passer la parole, j'aimerais souhaiter à tous, chers collègues, une bonne journée nationale de la presse, qui sera célébrée demain.

Général Gaye :
Merci. Je suis très heureux de me retrouver à l'antenne pour d'abord participer à la conférence de presse hebdomadaire de la MONUSCO, et également pour avoir l'occasion, à travers cette conférence, d'être entendu par l'ensemble des auditeurs et auditrices. Ma présence ici est une présence qui est liée au fait que je vais quitter la Mission à la fin du mois — dans moins de dix jours. Et j'étais donc venu saluer la presse, qui a un rôle considérable à jouer dans la mise en œuvre de notre mandat, dans la vulgarisation de ce mandat, mais également dans les différentes interpellations qui vont tout naturellement avec la vie d'aujourd'hui. Je me tiens tout simplement à votre disposition pour répondre aux questions que vous voudriez bien me poser.
(...)

Question 1
Albert Omba / TROPICANA FM : Mon général, je tiens d'abord à vous remercier aussi au nom de la presse congolaise pour tous les efforts que vous avez fournis en République Démocratique du Congo, d'abord pour gérer les forces des Nations Unies, et surtout pour être à la disposition de la presse chaque fois que l'occasion se présentait. Mon général, ma question va tout droit à dire, est-ce que le général Gaye est satisfait de sa mission en République Démocratique du Congo, après avoir passé son mandat, le plus long de tous les généraux qui sont venus à la Mission ?

Question 2
Patrick Ngbanga Letea / L'EXPRESSION : (...) Dans le passé, vous étiez parti et revenu encore en RDC. Est-ce que, s'il s'agissait encore de faire appel à vous pour travailler au Congo, vous allez accepter ?

Ma deuxième question, s'il s'agissait de faire un bilan de votre mission — la deuxième mission [quand vous avez été] rappelé ici en RDC — est-ce que vous pouvez nous brosser le bilan sur l'aspect sécuritaire, la sécurité des militaires [de la MONUSCO] que vous laissez ? Vous les laissez comment ?

Et comment vous jugez votre partenariat [avec] l'armée congolaise ?

Question 3
Roger Marley Lukunga / CMC TV : La fin d'un mandat en appelle toujours le début d'un autre. J'aimerais savoir quelle sera votre nouvelle affectation ?

Général Gaye :
Merci. Merci infiniment. Je m'attendais bien à ce qu'on me demande de faire un bilan de mon mandat. Je ne m'attendais pas à ce qu'on me demande si je suis prêt à revenir. Je commencerais par cette question. Lorsque, en novembre 2008, les Nations Unies m'ont demandé si j'étais prêt à revenir à la tête de la Force, pour une période temporaire, et ensuite dans des moments extrêmement difficiles pour la Mission et pour le pays, et plus particulièrement pour les populations du Nord-Kivu, je n'ai pas hésité un seul instant. Ma réponse a été : « oui, je suis prêt à revenir. » Je suis prêt à revenir d'abord parce que je crois que c'est le devoir d'un soldat que d'accepter les difficultés, que de répondre à ce que M. Doss lui-même, avant de partir, a qualifié « d'appel du devoir ». Ensuite, j'ai dit « oui » parce que j'avais un attachement tout particulier pour les hommes que j'avais eu le privilège de commander. Et j'avais compris que ces hommes étaient dans une situation difficile. J'ai dit également « oui » parce que j'avais, bien sûr, un attachement tout particulier pour ce pays, où j'avais déjà séjourné trois ans et demi. Mais j'espère que nous n'ayons pas, à l'avenir, à être dans une situation où il n'y ait d'autre recours que de faire encore appel à ma modeste personne.

Maintenant, que vais-je faire ? Il se trouve que je suis un officier général en activité, et que j'ai été mis par mon gouvernement à la disposition des Nations Unies. Je vais, dès que je vais rentrer à Dakar, me présenter devant mes autorités et leur rendre compte de ce qu'a été ma mission. Voilà ce que je vais faire dans l'immédiat.

Enfin, quel est le bilan que je fais de mon séjour ici ? Il n'y a pas un bilan propre au Commandant de la Force. Le Commandant de la Force agit au sein d'une Mission, et son action avec celle des autres sections substantives de la Mission concourt à l'accomplissement, à la mise en œuvre du mandat. Donc, par conséquent, mon bilan se confond avec celui de la Mission. Je pense que, si aujourd'hui la Mission commence son retrait progressif, qui a été autorisé par le Conseil jusqu'à un maximum de 2.000 hommes — et tout à l'heure, peut-être, vous ferai-je le point sur où nous en sommes sur ce retrait—, je crois que cela est révélateur qu'il y a des progrès sur le terrain qui permettent d'envisager ce retrait. Bien évidemment, dans une mission de maintien de la paix, tous les aspects du mandat ne sont pas mis en œuvre au même niveau de satisfaction. Il y a, sans doute, des aspects qui sont un peu en retard. Mais il n'y a pas un bilan propre à la MONUSCO. Il y a une situation où des partenaires travaillent ensemble. Ces partenaires, c'est bien sûr la Mission des Nations Unies, les agences des Nations Unies, mais également le gouvernement légitime de la République Démocratique du Congo. C'est ensemble que nous essayons de ramener la paix et la sécurité, et de nous placer sur le chemin d'un progrès durable pour ce pays. Voilà ce que je peux dire dans un premier temps.

Question 4
Richard Junion Kamunga/ RADIO OKAPI : Mon général, ces derniers temps, la presse congolaise accuse les Casques bleus de la MONUSCO de faire partie d'un plan pour la balkanisation de l'est de la République Démocratique du Congo ? Qu'en dites-vous ?

Question 5
Steve Wembi / MIGRANT 2 MIGRANT : A l'issue de votre mandat en RDC, quel est le bon souvenir que vous gardez, et son contraire ?

Général Gaye :
Très bien. Il y a toujours, dans des processus de sortie de crise, des hauts et des bas. Il y a ensuite toujours des démons que l'on agite de temps en temps. Dans ce pays, chaque fois qu'on parle du Katanga, bien évidemment, on ne peut pas occulter le fait que, dans le passé, il y ait eu une sécession. Alors de temps en temps, on agite des chiffons comme cela. Vous dites qu'on accuse la MONUSCO d'attiser un plan de balkanisation. Quand bien même il y aurait des plans de balkanisation, je crois que ce pays a prouvé dans les années passées qu'il était plus fort que la balkanisation. Et au fond, c'est ça qui importe. Peu importe ceux qui attisent le plan ; ce qui importe, c'est comment le pays réagit à ce plan. La vie internationale est faite de cela : elle est faite des difficultés pour les Etats, des compétitions, des confrontations. Et c'est aux Etats justement de se présenter dans cette vie internationale fort de leur identité, fort de ce qui fait justement leur force dans cette vie internationale. Bien évidemment, il n'y a pas de plan de balkanisation ourdi par la MONUSCO. Et les gens seraient bien en mal de présenter des éléments constitutifs de ce plan, parce qu'il n'y en a pas. Au contraire, je m'en vais la semaine prochaine, aux côtés des chefs d'Etats-majors des pays voisins et du général Etumba, tenir une réunion sur les opérations majeures qui sont en cours à l'est. Et je crois que c'est bien la preuve que, actuellement, bien au contraire, ce dont il faut se féliciter, c'est le rapprochement entre les différents Etats pour mettre fin aux forces négatives. Voilà ma réponse à cette question sur la balkanisation.

S'agissant des souvenirs, il faut essayer de mettre l'ordre dans sa mémoire quand on pose cette question. Mais je vous remercie, parce que c'est une question qui m'amène à rendre un hommage — un pieux hommage — à tous les casques bleus qui sont morts ici au service d'une cause qui est écrite au revers des médailles des Nations Unies. Au revers des médailles qu'on donne aux casques bleus, il est écrit : « Au service de la paix. » Et donc, c'est pour ça qu'ils sont morts. Plus particulièrement, j'ai été très affecté lorsque nous avons perdu neuf soldats des Forces Spéciales guatémaltèques dans le parc de la Garamba. Ca a été pour moi un souvenir qui m'a beaucoup marqué. J'ai été également personnellement très touché lorsque, dans les opérations contre le CNDP, la 7ème brigade intégrée n'a pas pu tenir Mushake comme nous pensions qu'elle pourrait le faire. Cela m'a beaucoup marqué.

Il y a aussi de bons souvenirs. Je dois avouer que, lorsque M. le président de la République a prêté serment à l'issue d'un processus électoral qui a été marqué par une participation massive de la population, nous avons eu le sentiment, avec Son Excellence M. Swing, que nous avions participé à l'histoire de ce pays, et que nous avions même pu sentir quelque part l'histoire se dérouler sous nos yeux. Il y a également beaucoup d'autres souvenirs, mais ce sont ceux-là qui me viennent à l'esprit.

Question 6
Roger Marley Lukunga / CMC TV : Au cours de votre mandat de novembre 2008 jusqu'à ce jour, des opérations de grande envergure se sont déroulées : Rudia I et II, Amani I et II, traque des FDLR avec les FARDC. Avez-vous pu dégager les leçons majeures de certaines faiblesses de vos troupes, qui, d'ailleurs, seront mieux réorientées pour de nouveaux exploits ?

Question 7
Patrick Ngbanga Letea / L'EXPRESSION : Je voulais un peu que le général puisse nous brosser sur la question de DDR, et puis si vous pouvez revenir... parce que vous n'avez pas répondu à ma question concernant votre partenariat avec les forces congolaises.

Général Gaye :
Je vais commencer par le partenariat avec les FARDC. Effectivement, c'est une bonne question, à laquelle je n'avais pas répondu. Le concept d'opération de la MONUC, tel qu'il avait été élaboré au lendemain des événements de Bukavu, consistait pour la Force à apporter un soutien aux FARDC dans les opérations de démobilisation forcée des forces négatives. Pour arriver à opérer de manière efficace avec une armée, il faut qu'il y ait un minimum d'interopérabilité entre les deux armées. Moi, j'ai considéré que la première chose qu'il fallait faire, si l'on voulait opérer avec les FARDC, tel que cela nous avait été prescrit dans les différentes résolutions du Conseil de Sécurité, il fallait sans doute mieux connaître les FARDC ; mais il fallait surtout respecter les FARDC. Malgré toutes leurs insuffisances. Il ne peut y avoir de relation au combat s'il n'y a pas un respect mutuel. Je crois que les FARDC ont toujours su que, quelle que soit les situations, nous leur avons témoigné du respect et de la considération. Cela ne nous a pas empêché de mettre en œuvre notre mandat, qui, notamment, comporte le respect de toutes les dispositions du droit humanitaire international. C'est, bien sûr, un domaine dans lequel nous avons eu quelques difficulté vu la nature de certaines unités des FARDC, suite à l'intégration parfois accélérée, et cela nous a amenés à une politique dite « politique de conditionnalité » mais je n'aime pas ce mot parce que c'est presqu'un barbarisme. Disons une politique de soutien sous condition. « Conditionality policy » en anglais, c'est bon. Mais en français, je crois qu'on devrait dire « politique de soutien sous condition. » Bien sûr, cette politique de soutien sous condition comporte énormément des contraintes dont nous avons pris nous-mêmes la mesure, les FARDC également, et nous faisons tout actuellement pour, malgré ces contraintes, opérer avec les FARDC. Donc, c'est un partenariat qui a été fondé sur un respect. C'est un partenariat qui n'a pas été sans difficulté. Nous avons prodigué aux FARDC un entrainement, notamment à douze bataillons. Les circonstances ont fait que cet entraînement, malheureusement, n'a pas pu se poursuivre, alors que nous avions l'ambition de faire beaucoup plus. Nous avons été un peu frustrés de n'avoir pas pu faire plus pour l'entraînement des bataillons, mais la plupart de ces bataillons ont été engagés en opération. En tous cas, une chose a été reconnue par tout le monde, c'est que, même lorsqu'il y a eu de la tension dans la manière dont les populations, les autorités percevaient l'action de la MONUC, les militaires, c'est-à-dire ceux de la MONUC/MONUSCO et ceux des FARDC, ont toujours gardé des relations très étroites. Parce que, simplement, nous étions ensemble sur le terrain ; nous faisions parfois face aux mêmes difficultés. Et, il ne faut pas hésiter à le dire, il y a eu une certaine fraternité d'armes sur le terrain, qui a dépassé toutes les contingences auxquelles nous avons pu faire face.

Maintenant, vous me demandez quelles sont les leçons majeures qui ont été tirées de la participation de nos troupes dans les différentes opérations dans lesquelles nous avons été engagés. Je pense que la question, il faudrait plutôt la poser à nos partenaires des FARDC et aux populations, parce que, sans doute, on a besoin d'un miroir pour pouvoir se juger. Moi, personnellement, j'ai trouvé qu'on avait été parfois injuste avec les casques bleus. Je me souviens que, avant de quitter la Mission en octobre 2008, j'avais dû vraiment monter au créneau pour dire que la manière dont les populations du Kivu traitaient les casques bleus, qui, partout, étaient face à une forme d'opprobre, était totalement injuste. Parce que les gens avaient fait beaucoup, ils étaient pratiquement les seuls hommes en arme que les populations, quoi qu'elles disent, rencontraient en ayant l'assurance qu'il ne leur arriverait rien de mal. Nous étions les seuls. Mais c'est ainsi, quand les situations sont difficiles, tout le monde a une part de difficulté. Nous avons accepté notre part. Personnellement, je pense que, si l'on fait référence à notre mandat, les casques bleus ont vraiment mis en œuvre leur mandat. Maintenant, il y a énormément d'attente de la part des populations, de la part également de nos partenaires des FARDC, et parfois il n'y a pas aussi eu une compréhension assez fine de notre mandat.

Maintenant, s'agissant enfin du DDR, vous posez une question qui est actuellement à l'ordre du jour. Je tiens à dire à nos auditeurs que le DDR, c'est donc le programme de démobilisation et de réinsertion des ex-combattants. Lorsqu'on dit DDRRR, c'est le programme de rapatriement et de réinstallation des groupes armés étrangers. Le DDR arrive vraiment à un moment où il faut l'évaluer et définir ce que sera son avenir. Parce que depuis cinq ans, nous n'avons cessé d'intégrer. Il y a eu des cas où des combattants se sont présentés au DDR, ont choisi la démobilisation, ont eu des cartes de démobilisé, se sont retrouvés à nouveau dans un groupe armé, et ce groupe armé s'est présenté à nouveau à l'intégration, et les anciens démobilisés ont choisi cette fois-ci d'intégrer l'armée. Alors, c'est un processus qui ne peut pas être un processus sans fin. Mais, enfin, ces situations-là s'expliquent. Certainement, ça prouve que la manière dont nous avons conçu le DDR, c'est-à-dire que le DDR est une solution une fois pour toutes à un problème des groupes armés, cette conception est peut-être mise en cause, et que, au fait, le DDR trouvera sa fin quand la stabilisation des zones en question sera complète. Quand les gens seront réinsérés dans le circuit de production économique, en ce moment-là, ils n'utiliseront plus leurs armes pour vivre. Donc, c'est une très bonne question ; c'est une problématique dans laquelle la Mission, aux côtés de différentes agences et des bailleurs de fonds ainsi qu'aux côtés, bien sûr, des autorités gouvernementales, va continuer à s'investir.

Question 8
Pasteur Tshibangu / LE SCRIBE : Mon général, je voulais un peu savoir... Vous avez un peu soulevé le problème d'interopérabilité avec les FARDC, mais je voulais savoir, qu'avez-vous en dehors du respect que vous avez de ces troupes ? [Quels sont] les points ou les difficultés [auxquelles] que ces armées nationales devraient à tout prix pallier ? Là, c'est ma première question.

Vous êtes aussi Chef d'Etat-major des forces onusiennes, mais il se fait, hélas, que depuis plusieurs mois, le Bureau du porte-parole de la MONUC ou de la MONUSCO manquerait le porte-parole militaire. Qu'en est-il au juste ?

Question 9
André Tshivuadi / APA : Mon général, il y a quelque temps, les FARDC font face aux rebelles ADF/NALU dans le Ruwenzori sans l'appui, bien évidemment, de la MONUC. Est-ce pour la MONUSCO un soulagement ?
(...)

Général Gaye :
Concernant les FARDC, j'ai eu l'occasion, en plusieurs occasions et en privé, de dire que je mettais au défi les armées de beaucoup d'autres pays de faire ce que les FARDC font, vu le problème de soutien logistique que rencontre cette armée. Je pense que la question que vous avez posée, les FARDC y ont apporté une réponse à travers le projet de réforme de l'armée, dans lequel les FARDC ont très courageusement mis en lumière l'ensemble des difficultés rencontrées par cette armée, et ont identifié également toutes les pistes qu'il faut pour régler le problème. Vous voyez bien que le pays vient d'atteindre le point d'achèvement de sa dette. Donc, il est clair que la dimension financière de la réforme de l'armée était une question difficile à régler. Je pense que, dans un système d'hommes et dans un système d'armes — les deux composants une armée — c'est toujours le système d'hommes qui va valoriser le système d'armes. Donc, personnellement, je pense qu'il est clair que, dans la réforme, l'accent qui est mis sur la réouverture des écoles, sur l'entraînement, sur la formation, si on arrive à le mettre en œuvre, il y a des raisons d'espérer.

En ce qui concerne l'opération contre l'ADF/NALU, vous demandez si la MONUSCO a senti un certain soulagement au fait que les FARDC aient opéré seules. Je pense que c'est bon de rappeler que c'est exactement le 24 décembre 2005 que nous avons lancé, avec les FARDC, la première opération conjointe de grande envergure contre l'ADF/NALU. Cette opération nous avait permis à l'époque de neutraliser une centaine de membres de l'ADF/NALU, dont des chefs, de récupérer environ 150 armes, et de détruire tous les camps de l'ADF/NALU dans la Graben Valley, dans la zone de Ruwenzori, en somme à l'est de Beni. Depuis, l'ADF/NALU était resté un groupe armé presque dormant, et ce n'est que ces temps-ci qu'il y a eu une résurgence des activités de l'ADF/NALU. Les FARDC ont choisi, sans délai, de mener une opération contre l'ADF/NALU. Elles nous en ont d'ailleurs informés. Le général Amuli m'en a parlé personnellement, que trois bataillons seraient engagés contre l'ADF/NALU pour éviter que ce mouvement ne reprenne trop d'importance. Je pense qu'il faut se féliciter de cette action des FARDC. La MONUSCO, même si ce n'est pas une opération conjointe mais une opération unilatérale, n'est pas loin. Nous avons des positions dans la zone. Nous avons établi de nouvelles positions à Erengeti, à Mutuanga, et en matière d'évacuation sanitaire même lorsque les opérations ne sont pas conjointes, lorsque nous avons une demande des FARDC pour évacuer des soldats blessés, nous le faisons. Nous venons de le faire dans la zone de Walikale, où les FARDC sont en opération contre les FDLR — une opération unilatérale. Nous avons évacué des blessés à Omate ; nous avons évacué vers Bukavu, vers Masisi et vers Goma. Voilà ce que je peux répondre.

Question 8 (rappel)
Pasteur Tshibangu/LE SCRIBE : Et le porte-parole militaire, qui se fait absenter depuis des mois ?

Général Gaye :
Ce n'est pas du tout quelque chose de délibéré de notre part. Rassurez-vous, vous aurez bientôt à cette table un porte-parole militaire. Il se trouve simplement qu'il y a eu des problèmes dans la relève du porte-parole militaire, mais nous continuons à donner au porte-parole de la Mission tous les éléments relatifs aux activités de la Force. Mais il y aura bien un porte-parole militaire à la conférence de presse.

Question 10
Nathalie Sekabuhoro / 2 ASTV : M. le général, si on vous demande de [faire le bilan] de différentes opérations menées entre la MONUC et les FARDC, que direz-vous ?

Général Gaye :
Je dirais que ces opérations sont d'abord, dans le cadre des opérations de maintien de paix, une très grande novation. Nous avions essayé de conceptualiser, dans une directive, la préparation, la conduite et le bilan de ces opérations. Je pense que ces opérations ont créé partout une importante différence, parce que nous avons essayé d'être pour les FARDC un multiplicateur des forces. A savoir que, partout où elles avaient des faiblesses, notamment en aéromobilité, en logistique, en préparation des opérations, nous avons essayé de les aider. Je sais que ces opérations également ont parfois créé des frustrations ou des incompréhensions dans la mesure où il y avait une certaine attente pour que la MONUSCO elle-même prenne l'initiative de certaines opérations ou contribue de manière plus significative, mais notre mandat en la matière est clair. Et je pense qu'il est toujours plus pertinent, comme le dit le proverbe, non pas de donner du poisson à quelqu'un mais de lui apprendre à pêcher. C'est un peu dans cette philosophie-là que nous avons fait les opérations conjointes : mettre les FARDC devant ; c'est leur pays. C'est ça qui est la solution la plus durable. Et je pense que, au bilan, le fait qu'aujourd'hui il y ait des opérations contre la LRA — l'opération Rudia — des opérations contre les FDLR, des opérations contre l'ADF/NALU, qu'il y ait des réunions entre les chefs d'Etats-majors, tout cela est quelque part, la Mission y a joué un rôle. Nous avons été les facilitateurs. A un moment où il n'y avait pas de représentation diplomatique entre les Etats, c'est nous qui étions en somme le secrétariat de ces réunions, qui faisions passer les différentes invitations, qui transportions parfois les délégations, qui, au moment où les réunions ne se passaient pas bien, jouions les facilitateurs. Et aujourd'hui, il est heureux de voir que tout cela n'est que du passé, qu'il y a un réel rapprochement, qu'il y a des opérations conjointes entre les Etats. Pour tout cela, quelque part, nous sommes un peu fiers aussi.

Question 11
Papy Kalokola / LA LIBRE ORIENTALE : Deux petites questions. La première, est-ce qu'il y a un lien entre votre départ et le départ du contingent sénégalais de la MONUC — MONUSCO pour le moment ?

De deux, parmi toutes les opérations militaires qu'il y a eues à l'est de la RDC — vous avez eu à participer effectivement à toutes ces opérations — laquelle a été la plus difficile selon vous, parce que vous en avez l'expérience ? Et puis, qu'est-ce qui explique aujourd'hui l'élasticité de l'opération de la traque contre les FDLR ?

Général Gaye :
S'agissant du départ du contingent sénégalais, vous savez, c'est très simple. Je vais vous expliquer. On a convenu avec le gouvernement de la République qu'il devait y avoir un début de repli de la MONUC. Et quand je dis, j'entends bien le Conseil de Sécurité, qui nous donne mandat. Et donc, nous avons été autorisés à rapatrier un effectif maximum de 2.000 hommes en tenant compte de la situation sur le terrain. Vous serez peut-être surpris, mais les contingents semblent beaucoup aimer votre pays. Parce que personne ne voulait être désigné pour être le premier à rentrer, parce que cela peut-être apparaissait aux yeux des contingents comme l'expression d'une absence de satisfaction de leur performance. Donc, personne n'était en somme content de devoir être désigné. Et c'est pour cela que j'ai dit, étant sénégalais et commandant des Forces, je vais désigner le contingent sénégalais pour être le premier à marcher. Et donc, les sénégalais ont été désignés pour ça, moyennant quoi personne ne pouvait se plaindre que le commandant de la Force a désigné mon contingent, parce que moi j'ai bien travaillé et je ne peux pas partir, etc. C'est ça au fond qui est un peu la raison pour laquelle le contingent sénégalais a été le premier à être désigné. Et ce n'est pas parce qu'ils n'ont pas bien travaillé, ou ceci, cela. Mais c'est aussi que, bien sûr, au-delà de ça, nous avons fait une évaluation de la situation, et les contingents qui partent sont bien évidemment les contingents qui opèrent dans des zones où nous estimons que le repli ne créera pas des préjudices à la paix et à la sécurité.

Maintenant, s'agissant des opérations, vous me demandez quelle est l'opération la plus difficile, bien évidemment, c'est l'opération contre les FDLR, parce que c'est l'opération de plus grande envergure. Et pourquoi l'opération a-t-elle une certaine durée ? [C'est] à cause des difficultés liées au terrain, liées au fait qu'il est extrêmement difficile d'éradiquer complètement une guérilla. Partout où les FDLR ont été présents, pratiquement les FARDC les y ont trouvés et les ont chassés. Mais, en les chassant, on ne les a pas tous neutralisés. Et on ne peut pas non plus occuper l'ensemble du terrain. Vous connaissez bien le Kivu : zone montagneuse, boisée, où il est possible de survivre parce que la nature est généreuse. Donc, voilà pourquoi l'opération dure. Egalement, il faut y ajouter les difficultés des FARDC, le problème d'aéromobilité, le problème de soutien logistique. C'est une opération très difficile mais dans laquelle, malgré tout, les FARDC ont obtenu, je pense, des résultats enviables et significatifs.

Question 12
Alfred Kalombo / RLTV : Mon général, je voudrais vous poser une question. Elle est relative aux opérations conjointes que vous avez eu à mener à l'est de la RDC, ensemble avec les FARDC. C'était les opérations de la traque des FDLR. Mais, au jour d'aujourd'hui, s'il faut en parler, les FDLR que vous avez chassés à l'est ont été transplantés à Lubumbashi par un programme privé, le PAREC. Au jour d'aujourd'hui, ces FDLR sèment de la désolation et de la terreur. Quelle a été la part de la MONUC, actuellement la MONUSCO, quand on était en train de transplanter cette insécurité ? Et au jour d'aujourd'hui que ça ne va pas à Lubumbashi, la MONUSCO pourra-t-elle envoyer encore ses casques bleus ou quelques éléments pour un peu y pallier ?

Général Gaye :&